Le Lot en Action mag n°36 (10 juin 2011). Par Bluboux
Le 25 mai dernier s’est tenue à Sauzet une réunion publique de présentation du projet d'installation d'une centrale pénitentiaire, à l'horizon 2017, sur un terrain de 15 hectares à moins de 1 500 mètres du centre du village. Toutes les huiles concernées étaient à la tribune : Super Préfet, Don Miquel, Monique Saillens (maire de Sauzet), Gilles Accomando (président du tribunal de Cahors) et Georges Vin (directeur interrégional des services pénitentiaire). La mairesse a semblé fort surprise en constatant que les deux cents citoyens, venus s’informer, étaient plutôt réfractaires au projet. Et on les comprend : la décision a été prise de façon unilatérale par le conseil municipal, sans qu’aucune information ou débat n’ait eu lieu sur la commune. Les habitants de Sauzet ont appris que le projet allait devenir réalité par voie de presse ! Les intervenants ont eu beau essayer de dresser un tableau idyllique de la situation, la création de 200 emplois, des familles heureuses de vivre avec des enfants partout, des retombées économiques avec des chiffres à faire tourner la tête, bref une opportunité formidable pour une petite commune insignifiante perdue sur le plateau, rien n’y a fait et ces ingrats de citoyens sont repartis encore plus inquiets.
Un collectif citoyen s’est créé, « Sauzet évasion », avec pour objectif de créer le débat public dont les habitants ont été privés et de réfléchir ensemble à l’avenir de la commune. Passer de 500 habitants à plus du triple n’est pas chose anodine ! Contrairement à ce qui a été annoncé par les intervenants lors de la réunion de présentation, la prison sera très vite pleine à craquer, et compte tenu de l’état du système carcéral dans la région, pas uniquement avec des courtes peines. L’administration pénitentiaire ne gardera à sa charge que les gardiens, tout le reste étant sous-traité à Bouygues ou Eiffage : entretien, maintenance, formation des détenus, hostellerie, transport et surtout le travail des prisonniers. Et oui, les prisons françaises sont quasiment totalement privatisées, comme aux Etats-Unis. D’ailleurs le ministère n’a donné son aval pour le projet que lorsque la MAEC s’est engagée à faire travailler l’agence d’intérim pénitentiaire ! Tiens tiens, d’un coup on commence à se dire que les deux cents créations de postes annoncées par les bonimenteurs, Don Miquel en tête, cachent quelque chose. Parce que si la MAEC préfère faire travailler des tolards à 4 euros de l’heure, probablement que d’autres entreprises vont suivre et que le coût pour l’emploi local risque d’être très lourd…
La liste des inconvénients et des aberrations du projet est longue et bien évidemment soigneusement cachée à la population. L’emprise des 15 hectares est sur un site protégé (Zones Naturelles d'Intérêt Ecologique Faunistique et Floristique) et l’éclairage du site toutes les nuits aura des conséquences indiscutables sur le biotope. L’assainissement pour une entreprise de travaux forcés qui accueillera 400 personnes plus 250 salariés n’est pas non plus une mince affaire dans ce milieu naturel protégé. Les besoin en énergie (deux lignes moyenne tension de 20 000 V vont très probablement relancer le projet de THT, qui a tant défrayer la chronique il n’y a pas si longtemps…). L’accueil des familles, y compris de gens du voyage (trois aires d’accueil avec plus de 100 caravanes pour la prison de Neuvic, en Dordogne, de taille et situation comparable). Les nuisances sonores (les visites ne se faisant que le week-end, toutes les nuits les familles échanges avec les détenus en hurlant derrière les grillages. Enfin l’augmentation spectaculaire des trafics, notamment de drogue (toujours en comparaison avec les prisons de Neuvic et Uzerche).
Il eut pourtant été bien plus logique de construire cette prison sur les réserves foncières de la ville de Cahors (transport, logistique, hôpital, services publiques). Alors on peut légitimement se demander si Don Miquel n’a pas finalement décidé cela avec son copain Blanchou, l’ancien Maire de Sauzet et Conseiller Régional, gros propriétaire terrien et agriculteur, vrai manitou de milieu agricole, petit baron local…
Le collectif citoyen Sauzet évasion est bien décidé à mettre tout ce dossier en débat sur la place publique, et compte tenu de la colère qui gronde, il y a fort à parier qu’il va y avoir du rififi à Sauzet. Le débat dépassera probablement très vite la dimension locale, puisque à deux encablures de là, à Albas, une association fait beaucoup parler d’elle, en réinsérant des mineurs délinquants, avec des résultats époustouflants, et en ayant créé 14 postes de salariés… Ajoutez à cela que deux jours avant l’annonce du projet de la prison de Sauzet, le rapport 2011 du contrôleur général des prisons en France, Jean-Marie Delarue, se termine par un constat d’échec du système carcéral français et pose la question de la pertinence de ce type d’établissement… Peut-être l’occasion de créer un débat avec un éclairage national, ce qui contrarierait probablement beaucoup nos petits seigneurs locaux…
La prochaine réunion publique est prévue pour le 5 juillet. Vous pouvez vous rapprocher du collectif par mail : [email protected]
3. J-C LAMOURE - Le 03/07/2011 à 10:35
2. S. ILLUSION - Le 30/06/2011 à 13:00
1. pierre verdier - Le 28/06/2011 à 14:01