Marianne2. 10 janvier 2010 par Jean-François Kahn
Pauvre Laurence Parisot. Elle rêvait de copiner avec Nicolas Sarkozy et il vient de la condamner à mort. Comme les empereurs romains il a baissé le pouce, expliqué à ses courtisans, affidés et seconds couteaux que la patronne du MEDEF, soudain chargée de tous les pêchés d’Israël, devrait être débarquée à la première occasion et aussitôt les chiens politico-patrono-médiatiques se sont rués sur la bête blessée. C’est naturellement Alain Minc, sur ordre de son supérieur, qui a sonné l’hallali. Comment ? En opposant vicieusement (Sarkozy lui en a lui-même soufflé l’idée) le bon interlocuteur syndical que serait Bernard Thibault, leader de la CGT, à la déplorable dirigeante patronale qu’est sensée être Laurence Parisot ou encore en faisant l’éloge des « chefs d’entreprise » tout en critiquant le « patronat », idée reprise auprès des responsables UMP par le Président de la République.
La raison de cette ire présidentielle ? La chouchoute médiatique d’hier (ce qui déjà en soi était mal vu de l’Elysée) se serait révélée « parano - à moitié folle, précise-t-on même parfois - égocentrique et à la recherche continuelle de coups médiatiques » autrement dit son principal crime serait de se comporter…comme Sarkozy.
Et encore ? elle n’a pas soutenu avec autant d’énergie qu’elle aurait dû la suppression de la taxe professionnelle, « peu fiable » elle a taclé à plusieurs reprises des mesures gouvernementales « pour le plaisir de faire parler d’elle », elle a cherché à « se donner le beau rôle » en dénonçant à plusieurs reprises les rémunérations pharamineuses de certains grands patrons.
Mais, surtout, l’aile la plus conservatrice et la plus néo-libérale du patronat – celle qui était justement la plus proche de Nicolas Sarkozy – rameutée et excitée par Denis Kessler et son clan, renforcés par les ex-« pestiférés » de L’UILM, a systématiquement sapé sa position auprès du chef de l’Etat : avec ce refrain méprisant reprit en boucle « pendant qu’elle s’amuse à philosopher sur les questions de société pour complaire aux médias qui défend les intérêts patronaux ? ».
Adieu donc Laurence Parisot ! Mais ça promet : ne vient-on pas de promouvoir encore un peu plus l’ineffable baron Selliére dans l’ordre de la légion d’honneur ?
L’année dernière on s’y était bousculé. Cette fois les débats se sont déroulés devant une salle plus qu’à moitié vide. Non seulement - horreur ! - la communication du Président de la République n’a pas bénéficié de la moindre reprise, mais, en outre, François Fillon a prononcé le discours de clôture devant tout juste deux cents personnes. Si on retirait les officiels et les gardes du corps cela confinait au conseil de famille. Colère au château. Eric Besson voué aux gémonies. Réaction d’un proche du roi « désormais quand Besson prend l’avion, il y a intérêt à s’inscrire sur un autre vol ».
Phénomène significatif. On ne sait si, politiquement, le Front National est reparti à la hausse, mais, en conséquence de la politique folle de la droite et de l’aveuglement de la gauche bien pensante, ses idées, elles, progressent dangereusement.
La Cour d’appel de Versailles a rendu un jugement d’où il ressort que le chef de l’Etat a parfaitement le droit d’être considéré comme une victime, et être indemnisé comme telle, mais pas d’être déclaré coupable et condamné comme tel.
On imagine ce slogan lors des prochaines manifestations : « Nous voulons tous être des chefs d’Etat ».
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