Plume de Presse. 19 décembre 2009 par Olivier Bonnet
Nous dénoncions pas plus tard qu’il y a deux jours le scandale du désengagement de l’Etat dans le secteur du logement, alors même que le pays est victime d’une crise sans précédent dans ce domaine, avec "3,5 millions de personnes non ou mal-logées, auxquelles s’ajoutent plus de 6,5 millions de personnes en situation de réelle fragilité de logement", comme le dénombre le rapport de la Fondation abbé Pierre. Il en est un autre : la loi du 29 juillet 1998, modifiée le 13 juillet 2006, dispose dans son article L. 641-1 que "Sur proposition du service municipal du logement et après avis du maire, le représentant de l’Etat dans le département peut procéder, par voie de réquisition, pour une durée maximum d’un an renouvelable, à la prise de possession partielle ou totale des locaux à usage d’habitation vacants, inoccupés ou insuffisamment occupés, en vue de les attribuer aux personnes mentionnées à l’article L. 641-2". Mais cette loi n’est jamais appliquée.
L’association Droit au logement dresse un réquisitoire accablant : "Alors que la crise du logement s’aggrave, il y a 1,8 millions de logements vacants en France, dont 330 000 en ile de France et 122 000 à Paris, selon l’Insee. Ils sont vides par négligence, par calcul mercantile, par refus égoïste de louer… et ceci, sans compter les millions de mètres carrés de locaux et de bureaux également inoccupés…
Ces logements sont vacants alors que 15 000 ménages en Ile de France dont 10 000 à Paris sont reconnus prioritaires et attendent que les Préfet les reloge comme les y oblige la loi DALO. Ils sont vacants, alors que des artistes, des précaires, des intermittents des jeunes, des étudiants, ou des mal-logés réquisitionnent des espaces vacants pour se loger, en faire des lieux de vie, de travail et d’échange. Ils restent vides lorsque les habitants en ont été expulsés, comme au 69 rue de Sèvre...
Ils sont vacants depuis parfois des décennies, comme le 1 bis place des Vosges réquisitionné depuis le 27 octobre.
Ils sont vides et pourraient servir de logements « tiroir » pour les résidents de foyers en réhabilitation plutôt que les expulser et les laisser dehors comme rue David d’Angers.
Ils sont inoccupés alors que des demandeurs d’asile et des sans-abris se cachent pour dormir dans des squares et des sous-bois.
Ils sont vides, alors que les sans-abris meurent plus nombreux chaque année*, que les enfants des taudis sont atteint de saturnisme, que des famille entières sont en errance sans pouvoir assurer une vie et une scolarité décente à leurs enfants, car ils sont privés de logement.
Ils sont vides alors que les marchands de sommeil, les spéculateurs et les bailleurs privés font leur beurre, que les couches populaires sont chassées des centres, que les jeunes et les étudiants ne peuvent plus se loger que les locataires se serrent de plus en plus la ceinture pour payer leur loyer.
Ils sont vides, alors que 1,3 millions de familles attendent un HLM, dont 300 000 familles en Ile de France, que le nombre d’expulsions sans relogement est en hausse à cause de la spéculation et de la flambée des loyers.
L’État est en faute, car il refuse d’appliquer la loi de réquisition, il piétine la loi DALO. Or la loi de réquisition a été utilisée avec succès depuis sa création en 1945, notamment en 1995 et 1996, suite à l’occupation de la rue du Dragon par des sans logis, des associations, l’Abbé Pierre, et beaucoup d’autres.
De plus en plus de voix réclament l’application de la loi de réquisition, comme le Comité de suivi de la loi DALO. La décision appartient au Gouvernement, en donnant instruction aux
préfets d’appliquer la loi, tout simplement !"
Mobilisation !
Comme le résume Jeudi-Noir : "Alors que le comité de suivi du DALO réclame des réquisitions, et que deux propositions de loi en ce sens viennent d’être rejetées (une au Sénat proposée par Thierry Repentin et François Rebsamen et une à l’Assemblée proposée par Noël Mamère), Jeudi-Noir, le DAL, le COPAF, AITEC et de nombreuses autres associations se mobilisent samedi pour la réquisition des centaines de milliers de logements vacants, et des quelques millions de mètres carrés de bureaux vides en Ile-de-France... RDV samedi pour une marche de Noël pour les réquisitions, départ 14 h place Notre-Dame de Lorette." Le rassemblement s’annonce festif, puisqu’il est précisé "instruments de musique et vin chaud bienvenus".
* On se souviendra de la promesse de Nicolas Sarkozy, ignoble d’hypocrisie et de cynisme, que nous dénoncions, hasard du calendrier, il y a trois ans jour pour jour : Plus de SDF, promet Sarkozy : Stop, Démagogie Flagrante ! D’autant plus scandaleuse lorsqu’on la met en perspective avec les moyens alloués au sujet, comme le faisait Augustin Legrand en septembre 2007.
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