Les cinq mensonges de Mam

Plume de Presse. 16 février 2011 par Olivier Bonnet

Alliot-Marie jusqu’à la lie… Dans une vraie démocratie, un ministre convaincu de mensonge doit démissionner. En Sarkozie, Michèle Alliot-Marie a commis pas moins de cinq mensonges et a « tout le soutien » du gouvernement.

« Le Canard enchaîné ne lâche pas Michèle Alliot-Marie, et fait de nouvelles révélations, relaie Le Monde. Selon Le Canard, les parents de la ministre, Bernard et Renée Marie, âgés de 94 et 92 ans, qui étaient du voyage en jet avec la ministre des Affaires étrangères, étaient venus pour investir dans une société civile immobilière (SCI).Ils auraient racheté à Aziz Miled et à son fils Karim la totalité des parts de la SCI Ikram, dans laquelle ils possédaient déjà des parts. Le journal publie des extraits du registre municipal de la ville de Tabarka, où aurait eu lieu la transaction. Déjà propriétaires de 13% de la SCI, les parents de la ministre auraient acheté la totalité des parts, pour un minimum de 325 000 euros, selon l’hebdomadaire. » En voulant défendre sa fille, Bernard Marie l’enfonce, comme le relève France soir, qui pointe en titre Les contre-vérités de Michèle Alliot-Marie : « Si l’on en croit la ministre des Affaires étrangères, la rencontre avec Aziz Miled était fortuite. Ce n’est qu’à l’aéroport de Tunis que l’homme d’affaires aurait proposé à Michèle Alliot-Marie d’utiliser son jet privé pour se rendre à Tabarka. «Après Noël, je suis partie quelques jours en Tunisie, je suis allé jusqu’à Tunis par une ligne régulière et m’attendait cet ami. (…) Il me dit : je dois aller à Tabarka dans mon hôtel. J’ai un avion, je suis tout seul. Est-ce que vous voulez m’accompagner plutôt que de faire deux heures de voiture ?» (Journal télévisé de France 2, 2 février 2011). Les faits : mercredi, sur Europe 1, Bernard Marie, le père de Michèle Alliot-Marie, a donné une autre version des vacances. Mi-décembre, la famille décide de séjourner en Tunisie. «C’est à ma demande que Monsieur Miled a organisé notre séjour ensemble dans un hôtel», a reconnu Bernard Marie. Aziz Miled met à leur disposition son jet «pour (leur) économiser à (sa) femme et à (lui-même) deux heures et demie de voiture en pleine nuit». Le voyage, comme la rencontre avec Aziz Miled sur le tarmac de l’aéroport de Tunis, n’a donc rien de fortuit. D’autant plus que, durant le séjour, les parent de Michèle Alliot-Marie achètent une société civile immobilière à l’homme d’affaire tunisien.«  Un homme d’Etat ne devrait pas mentir : qu’elle démissionne !

D’autant que ce n’est pas tout : « Pendant ses vacances en famille à Tabarka, au nord-ouest du pays, et alors même que la répression contre les manifestants tunisiens faisait rage, la ministre a bien eu le président Zine el-Abidine Ben Ali au téléphonerévèle Mediapart. Cette conversation, évoquée au conditionnel dans un article récent du Nouvel Observateur, a été confirmée ce mardi à Mediapart par le ministère des affaires étrangères. (…) Cet aveu, tardif, pose une foule de questions auxquelles le ministère se refuse, pour l’instant, de répondre. La chef de la diplomatie française et l’ex-dictateur forcé de quitter le pays le 14 janvier ont-ils, lors de cet entretien, évoqué l’immolation le 17 décembre de Mohamed Bouazizi, ce jeune vendeur ambulant de Sidi Bouzid dont le geste désespéré est à l’origine de la révolution ? Ont-ils parlé des deux jeunes hommes mortellement blessés le 24 décembre par les tirs à balles réelles de la police ? Surtout, lors de cet entretien, le président Ben Ali a-t-il demandé l’assistance de la France pour mater la rébellion ? Une source au Quai d’Orsay dément. Pourtant, deux semaines plus tard, le 11 janvier, la ministre des affaires étrangères proposait devant les députés de mettre à la disposition du gouvernement tunisien «le savoir-faire reconnu dans le monde entier de nos forces de sécurité». En tout cas, une bonne partie de la stratégie de communication de la ministre tombe à l’eau. Début février, elle affirmait n’avoir eu «aucun contact privilégié» avec le président Ben Ali avant sa fuite. Elle avait aussi déclaré : «Quand je suis en vacances, je ne suis pas ministre», avant de se rétracter deux jours plus tard. En réalité, l’existence de cette conversation montre que Michèle Alliot-Marie a continué à suivre la situation en Tunisie pendant ses vacances. » Rappelons que la minsitre avait précisé le 30 janvier dans Le Parisien : « La dernière fois que j’ai vu l’ancien président, en tête-à-tête, c’était en 2006, dans mes fonctions de ministre de la Défense« . Cas typique de mensonge par ommission, pour ne pas avouer le coup de fil gênant au dictateur en pleine révolution.

Parce que Mediapart est ici charitable de ne pas rappeler un autre de ses mensonges, comme s’en charge France Soir « D’après Michèle Alliot-Marie, la révolution de jasmin n’a débuté qu’après son séjour. Ses vacances en Tunisie ne pouvaient donc pas s’apparenter à un soutien informel au régime de Ben Ali. «Il n’y avait rien. On savait qu’il y avait quelques mouvements dans le centre de la Tunisie de la part de gens qui avaient des problèmes (sic). Même le suicide qui a été l’origine des événements s’est produit à la fin de notre séjour» (Journal télévisé de France 2, 2 février 2011). Les faits : Mohamed Bouazizi était un vendeur ambulant de 26 ans. Il s’est immolé par le feu le 17 décembre pour protester contre la saisie de sa marchandise par la police. Dès le 19 décembre, le centre-ouest du pays est le théâtre de violents affrontement entre manifestants et forces de l’ordre. Le 22 décembre, un autre jeune Tunisien se donnait la mort en s’électrocutant. Les manifestations se poursuivent. Le 28 décembre, le président Ben Ali se rend au chevet de Mohamed Bouazizi, alors dans un état critique. Le soir même, il dénonce «l’ampleur exagérée qu’ont pris ces événements à cause de leur instrumentalisation politique par certaines parties». Le lendemain, le 29 décembre, Ben Ali procède à un remaniement de son gouvernement. (…) Michèle Alliot-Marie a séjourné en Tunisie entre Noël et le jour de l’An. » Mam n’a donc pas emprunté le jet d’Aziz Miled de façon fortuite mais le voyage était planifié, elle s’est entretenue au téléphone avec le dictateur pendant son séjour, durant lequel la révolution tunisienne faisait déjà rage : après ces trois lmensonges, vous en reprendrez bien un quatrième ?

Le voilà, à nouveau rappelé par France Soir : « D’après Michèle Alliot-Marie, Aziz Miled est un homme d’affaire qui a été «spolié» par le gouvernement Ben Ali. «Cette personne que vous osez aujourd’hui attaquer est un chef d’entreprise qui est respecté en Tunisie, d’autant plus respecté qu’après avoir été spolié par monsieur Trabelsi qui, effectivement, avait de force pris une partie de son capital et sa présidence, cette même personne la semaine dernière a été rétabli dans ses droits par le gouvernement tunisien» (Questions au gouvernement, le 2 février 2011). » Victime du régime, Miled ? Balivernes battues en brèche par le quotidien : « En 2004, l’homme d’affaires avait été l’un des organisateurs de la campagne présidentielle de Ben Ali. En 2009, comme le souligne LeMonde.fr, il figurait sur la liste des 350 membres du comité central du parti de Ben Ali, le Rassemblement constitutionnel démocratique. Plus récemment, en août 2010, il militait, comme plusieurs dizaines d’autres personnalités tunisiennes, pour que le président Ben Ali, «le sauveur de la patrie», se représente en 2014. » Mediapart ajoute des précisions : «  C’est qu’Aziz Miled, le pionnier du tourisme en Tunisie et patron de l’hôtel où a séjourné la ministre est un homme puissant. Très riche, il dirige un des groupes les plus importants de Tunisie (TTS) et s’est très souvent associé avec des membres des familles Ben Ali et Trabelsi. Même ses amis le présentent comme un proche de l’ancienne famille régnante. Quoi qu’en dise Michèle Alliot-Marie, qui n’a pas hésité à le présenter comme une «victime» de l’ancienne dictature, «Aziz Miled est la cheville ouvrière de la prédation en Tunisie. Il est au centre de la pieuvre», explique un avocat tunisien spécialiste de la corruption. Décoré par Ben Ali de la plus haute insigne du régime, sénateur désigné, bailleur de fonds des campagnes électorales depuis 1989 et organisateur des donations des hommes d’affaires, il est aussi celui qui a payé 500 000 euros pour le feu d’artifice donné en 2009 en l’honneur de la réélection du dictateur à Tunis, selon un proche des organisateurs. » Nous annoncions en titre cinq mensonges, voici le dernier, dénoncé par Mediapart : « comment imaginer que Mam et sa famille aient payé leur facture d’hôtel ? Elle continue de le prétendre, jouant sur l’ambiguïté familiale : officiellement, la ministre a payé les billets d’avion pour tout le monde et, en contre-partie, ses parents ont réglé les chambres (pour un montant que son cabinet est incapable de préciser). Y compris la suite présidentielle utilisée par la ministre, celle-là même qui avait été conçue pour accueillir Ben Ali et sa femme (eux n’y ont jamais séjourné). A Tabarka, personne ne croit à ce scénario : «Ils n’ont pas payé, le patron a tout payé», dit un cadre du groupe d’Aziz Miled. «Avec Aziz, personne ne paie. Il n’y a jamais eu de facture», renchérit un de ses proches. » Un seul mot en conclusion ? Démission !

PS : relire notre article du 8 février dernier, Sarkozy, Mam, Ollier, Fillon… vive les vacances aux frais des dictateurs !

Mise à jour : un sixième mensonge nous avait échappé, relevé par L’Obs.com qui cite Alliot-Marie prétendant, à propos de sa relation avec Miled, « C’est simplement une relation désintéressée et amicale« . Avec la révélation des bonnes affaires de ses parents – dont elle pourrait bien hériter ! -, on ne peut parler de « relation désintéressée ».


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Dernière mise à jour de cette page le 22/02/2011

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