La DCRI service secret qui fait parler de lui

Blog du Monde. 22 septembre 2010

La direction centrale du renseignement intérieur a vu le jour en juillet 2008. On se demande qui a soufflé au président Sarkozy l’idée de démanteler la DST et les RG pour créer cette entité… Certainement personne. Cette décision relève-t-elle de l’envie un rien mégalo de disposer d’un service de renseignements démesuré ou d’une analyse sérieuse axée sur l’efficacité ? Sans doute un peu des deux. Mais comme souvent de nos jours, on a oublié de prendre en compte l’élément humain. Les anciens de ces deux services sont-ils satisfaitsdcri_logo.1285142268.png de ce changement ? Sont-ils plus efficaces ? Nous le saurons peut-être un jour, lorsque l’un d’eux écrira « son » bouquin, comme l’ont fait plusieurs patrons de la DST.

En attendant, aujourd’hui, 3 à 4 000 fonctionnaires s’activent, pour le plus grand nombre sous le sceau du « secret défense », dans des missions classées… « secret défense ». Que font-ils exactement, on n’en sait rien. Ils assurent notre sécurité, nous dit-on. Mais, au détour d’une affaire de quatre sous (là, j’exagère), où l’on découvre une promiscuité malsaine entre une milliardaire et un ministre, les dirigeants de notre journal favori, Le Monde,  bombent le torse (dans une attitude très sarkozienne smiley.1285146230.png), en criant haut et fort être victimes d’une enquête illégitime de ce service.

Dans le même temps, dans un nuage de fumée, le chef de la DCRI nous affirme que son action nous évite chaque année deux ou trois attentats terroristes (la DCRI a juste deux ans d’âge) et que les menaces n’ont jamais été si fortes. Déclarations relayées par celui qui est l’homme de l’été, et que dans le sérail on surnomme gentiment Brice de Beauvau. Bon, nous, on veut bien les croire. Difficile de dire le contraire. Car si demain il y avait un attentat, on aurait l’air fin. Mais comme le plan Vigipirate est au rouge vif depuis maintenant plus de cinq ans, il est bien difficile de faire plus, sauf à passer du rouge à l’« écarlate ». Avec pour conséquence la mise en œuvre, comme il est dit pudiquement sur Service-Public, de « mesures particulièrement contraignantes ».

Autrement dit, on serait à deux doigts de l’état d’urgence.

Pour l’heure, en dehors de « protéger les intérêts de l’État » (?), comme dans l’affaire Woerth-Bettencourt, ou les rumeurs sur le couple présidentiel, le seul résultat concret que l’on connaît de la DCRI, c’est l’affaire de Tarnac. Vous vous souvenez, ces Corréziens interpellés pour avoir eu l’intention de tenter de saboter les caténaires des TGV… Tiens, où en est donc cette enquête retentissante ? Bon, il y a bien aussi ce projet d’attentat contre l’immeuble qui abrite la DCRI…

Il est quand même bizarre qu’un service secret fasse autant parler de lui. Je me souviens, lorsque j’étais officier de police à la DST, si l’on nous questionnait sur l’utilité de notre boulot, on répondait en souriant : « Vous ne pouvez pas savoir tout ce qu’on fait pour vous, et on ne peut pas vous le dire, puisque c’est secret ».

Parlons net. Alors qu’on remplace les policiers sur le terrain par des caméras, et que pour combler les vides on augmente les prérogatives des polices municipales ou des agents privés ; et qu’en fait les principales mesures pour combattre l’insécurité se cantonnent à des opérations coup de poing, des déclarations d’intentions ou des textes de loi ridicules, on est en droit de demander un audit sur l’action de la DCRI. Cela ne doit pas être difficile, puisqu’il existe au sein de ce service un département chargé de l’évaluation de la stratégie et de la performance.

En tout cas, il faut être vigilant. Dans de mauvaises mains, un service secret doté de prérogatives de police judiciaire pourrait être la pire des choses. On n’en est pas là, heureusement, même si dans notre pays toutes les décisions partent du 8° arrondissement de Paris…

Je crois qu’il est donc temps de faire entracte au spectacle permanent de la classe politique, d’arrêter de nous prendre pour des enfants, et de nous parler franchement, les yeux dans les yeux, tant sur les risques d’un attentat que sur la réforme des retraites.

En fait, on voudrait juste pouvoir faire confiance aux gens qui sont en charge du pays. Et pour l’instant, on est loin du compte.


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Dernière mise à jour de cette page le 08/10/2010

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