Quand l’école publique est en danger

Le Lot en Action mag n°29. 03 février 2011 par Bluboux

16.000 suppressions de postes sont attendues cette année au sein de l'Éducation nationale pour l'ensemble de la France.  Les suppressions de postes dans l'Académie de Toulouse s'élèveraient, selon le syndicat enseignant UNSA, à 150 postes dans les écoles, à 32 postes dans les collègues et lycées, alors que les effectifs dans les classes augmenteraient de plus de 4 000 élèves. « On craint une situation très difficile pour les départements ruraux, où il y a des risques de fermetures de classe ou d'écoles » selon Marc Gineste, le secrétaire régional du syndicat.

Dans le Lot, toujours selon l’UNSA : « 18 postes d'enseignants en moins dans les écoles maternelles et élémentaires, 5 postes de moins dans les collèges, 6,5 postes de moins de dans les lycées professionnels, une baisse annoncée de la scolarisation des enfants de 2 ans, la majorité des classes de 6ème à 30 élèves et de seconde à 35 élèves ».

Cette année la situation est déjà catastrophique dans la plupart des établissements, effectifs par classe insupportable, difficultés dans les remplacements, sacrifice des RASED, ambiance délétère au sein des équipes… La suppression de 30 postes supplémentaires va conduire inéluctablement à la fermeture de classe, voire d’école.

Alors que faire dans cette situation ?  Vous connaissez l’état d’esprit qui anime l’équipe du LEA. Nous préférons mettre en avant les initiatives citoyennes qui « font, innovent, agissent » plutôt que la contestation pure et dure, qui, si elle n’est porteuse d’engagement citoyen, d’alternative et de propositions ne fait que renforcer ce qu’elle prétend combattre et déresponsabilise les citoyens.

Il y a certes de nombreux projets d’écoles alternatives qui se montent dans le Lot (celle de Montcuq-Lauzerte fonctionne déjà, la Calendreta à St Céré également), mais si ces projets sont intéressants, innovent et fonctionnent de façon associative (implication réelle des parents), ils n’en demeurent pas moins des écoles… privées. L’éducation nationale est un service public essentiel et doit être défendu. Baisser les bras aujourd’hui, renoncer à défendre l’école publique et à la faire évoluer (positivement) signifierait  « abandonner » le liant principal de notre société. Il n’y a donc pas d’autre solution que de se battre bec et ongle pour préserver nos écoles. Quand les parents d’élèves, les enseignants, les élus sont solidaires et agissent, quitte à « radicaliser » leurs actions (occupation des établissements, de l’Académie) et attirent forcément l’attention les médias, l’Inspecteur Académique, le Recteur, voire le Préfet reculent. Ce fût le cas à deux reprise à Lacapelle-Marival, l’année dernière à Latronquière, et cette année encore, il y a quelques jours : en réaction à l’annonce de la fermeture d’une classe dans l’école de Cressensac en septembre 2011, les maires de Cressensac, Sarrazac et Cazillac ont créé un comité de défense des services public et l’ont fait savoir, notamment dans la Gazette des Maires. Presque immédiatement, l’Inspecteur d’Académie a fait machine arrière. 

Une manifestation a eu lieu le samedi 22 janvier dernier à Cahors, pour protester contre l’annonce de la suppression de 30 postes, et la présence de nombreux élus a été remarquée. Un collectif citoyen de sauvegarde des écoles de village a été créé et entend s’opposer à toute fermeture de classe sur notre département (voir l’article « Défendre l’école, le village ! »). Informer efficacement, mobiliser les parents, les enseignants et les élus, mettre en place un vrai réseau de solidarité sont les enjeux qui permettront de faire reculer l’Académie. Le Recteur de Toulouse risque fort de ne pas toucher sa prime…

 

Défendre l’école, le village !

 

Communiqué du CCSEV.

Défendre la possibilité pour nos enfants d'être scolarisés au plus près de chez eux, dans des écoles à taille humaine, et refuser la désertification des campagnes. En résumé, défendre les écoles rurales, défendre les villages sont les raisons qui nous ont conduits devant la Mairie de Cahors samedi 22 janvier dernier.

Au moment où 18 suppressions de postes enseignants en maternelle et primaire sont annoncées sur le Lot pour la rentrée prochaine, le Collectif Citoyen de Sauvegarde des Ecoles de Villages (CCSEV) ne pouvait que répondre présent à l'appel du collectif « Un pays, une école, notre avenir ».

Qui sommes-nous ?

Le Collectif Citoyen de Sauvegarde des Ecoles de Villages (CCSEV) est né en 2010 après la fermeture d’une des deux classes de maternelle à Anglars-Juillac, dont le RPI est passé de 5 à 4 classes. Autour de nous, parents, grands-parents, habitants et actifs des villages ont commencé à se mobiliser pour défendre les écoles rurales. Au jour d'aujourd'hui, nous nous réunissons régulièrement sur les cantons de Catus, Luzech et Puy-l'Eveque. Le rassemblement de samedi nous a permis d'échanger avec les enseignants, d'informer et de mobiliser un plus large public autour de notre lettre ouverte.

Nous avons eu le plaisir de retrouver de nombreux élus (communes d'Albas, Anglars-Juillac,

Baladou, Cahors, Cressensac, Douelle, Duravel, Frayssinet-le-Gélat, Labastide-du-Vert, Montcabrier, Prayssac...) dont certains ont déjà voté notre motion en conseil municipal, ainsi que le Conseiller régional M. Laybros et le Président du Conseil Général M. Miquel. Les maires sont venus pour défendre, une fois encore, leur école, ou par solidarité avec d'autres villages dont la classe est menacée.

Que voulons-nous ?

- maintenir les écoles dans nos villages. Au fil des années, ont été investi argent et énergies pour construire et améliorer ce service fondamental à la population et à nos enfants ;

- soutenir une école de qualité. Qualité de l’enseignement dispensé, bien sûr, mais également qualité des rapports qui se tissent entre enfants et adultes, et entre enfants eux-mêmes, dans une structure à taille

humaine ;

- conserver l’attractivité de la commune. La présence d’une école attire de nouveaux habitants, assure la fréquentation des commerces locaux, valorise le village dans son ensemble ;

- maintenir les emplois locaux. L’école représente des emplois induits auxquels nous tenons ;

- préserver le lien social et intergénérationnel. L’école du village est un lieu d’échange où se retrouvent régulièrement les parents, elle tisse le lien social indispensable à la vie de nos communautés.

Nous affirmons que cette école est aujourd’hui gravement menacée !

Des éléments concordants et provenant de l’Education Nationale nous permettent de le penser :

- Relèvement du nombre moyen d’élèves par classe (dans un premier temps 1 élève par classe) uniformément au plan national ;

- Volonté affichée de supprimer des postes d’enseignants sur tout le territoire et plus spécifiquement sur les petites écoles. Environ 12 classes supprimées à la rentrée 2010 dans le Lot, et encore 16 000 postes de fonctionnaires supprimés en 2011 !

- Imminence de la création d’Etablissements Publics d’Enseignement Primaire (EPEP), avec pour conséquence la fermeture des petites écoles. (art. 86 Loi du 13-08-2004 relative aux libertés et responsabilités locales) ;

Nous ne pouvons accepter un tel séisme et nous ferons tout pour l’éviter : Nous fédérons la population dans le but de peser sur les décisions nationales à l’impact désastreux pour nos villages. Nous alertons et convainquons les élus. Nous prenons part aux échanges d’expérience de territoires concernés par des situations similaires.

En effet, c'est bien de solidarité dont il s'agit !

Solidarité entre petits villages, car les objectifs de suppressions de postes semblent décidés en haut lieu puis plaqués sur nos territoires, tombant sur telle ou telle commune sans que l'on comprenne la logique (sauf comptable !), et sans concertation. Solidarité entre les villages et les bourgs, car il faut bien être conscient que la disparition d'une école vient surcharger les effectifs dans les écoles voisines, sans moyens proportionnels.

Solidarité avec les familles moins aisées et celles dont les mères travaillent : comment faire pour financer l'aide aux élèves en difficulté, ou l'accueil des 2-3 ans ? Une réduction supplémentaire de postes est impossible sans impact sur la qualité de l'enseignement. L'école n'est ni une chaîne de production, ni une garderie.

D'année en année, nous voyons fondre les missions que l'école publique assure jusqu'à présent gratuitement, pour nous tous. Alors que, pour faire face à l'avenir, il faudrait au moins les préserver, voire les développer !

D'expérience, nous savons qu'une suppression de classe peut aller très vite... A terme, nous voyons bien se mettre en place un mécanisme dangereux avec des disparitions d'écoles et la concentration sur de gros établissements.

Deux réunions sont programmées par l'Inspection Académique les 7 et 14 février prochains pour valider la carte scolaire 2011. Nous proposons donc plusieurs initiatives : rencontre du collectif le 2 février, avant une prochaine action à Cahors.

Nous appelons tous ceux qui le peuvent à nous soutenir, en signant notre lettre ouverte, notre motion et en se rapprochant de leurs élus.

Contacts : tel : 05 65 21 48 45 - email : [email protected]

 

Un ancien proviseur rend ses palmes académiques

Un proviseur du Nord à la retraite a renvoyé ses palmes académiques à Luc Chatel pour protester contre les suppressions de postes dans l'Éducation nationale et l'attribution d'une prime aux recteurs ayant atteint les objectifs en la matière. Il a expliqué avoir renvoyé ses palmes académiques le 22 décembre au ministre de l'Éducation nationale, Luc Chatel, par courrier recommandé avec accusé de réception.

Michel Ascher se dit « scandalisé » par un décret du 12 novembre 2010 qui institue une part variable dans les primes versées aux recteurs « en fonction des objectifs atteints », parmi lesquels figurent les suppressions de postes. À la faveur d'un décret et d'un arrêté publiés en novembre, leur prime comporte, à partir de cette année scolaire, deux volets : une part fixe de 15.200 euros et une « part variable » dont le montant pourra aller jusqu'à 45 % de la part fixe, soit de 0 à 6.840 euros. Au total, un recteur pourra avoir jusqu'à 22.000 euros de prime.

« Qu'est-ce que ça veut dire d'agiter 7.500 euros au nez des recteurs s'ils arrivent à supprimer un maximum de postes dans les académies ? » s'est interrogé Michel Ascher. « Ceci m'a paru tellement scandaleux que la coupe est pleine, il fallait que, symboliquement, je fasse un geste fort », a ajouté Michel Ascher, selon qui « le ministre semble considérer de manière particulièrement méprisante ses recteurs ».

 

 

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