Dans la province de Vénétie, en Italie, certains ouvrages sont bannis des bibliothèques municipales et des établissements scolaires. Ceux des écrivains qui ont signé en 2004 un appel en faveur de Cesare Battisti [1] et les ouvrages jugés « non éducatifs » par la Ligue du Nord, au pouvoir dans la région. « Nous n’avons aucune intention de réclamer un quelconque autodafé. Simplement, nous inviterons toutes les écoles de Vénétie à ne pas approuver, faire lire ou conserver dans leurs bibliothèques » ces textes, se défend Elena Donazzan, conseillère régionale chargée de l’éducation et de la formation, dans un article publié par La Repubblica. « Un boycott civil est le minimum qu’on puisse demander à l’encontre des intellectuels qui réclament l’impunité pour quelqu’un qui a été condamné pour des crimes odieux », aurait-elle écrit aux proviseurs de la région.
Les écrivains pro-Battisti ne sont visiblement pas les seuls à être mis à l’index. La Reppublica cite le cas d’un directeur de bibliothèque, dans la province de Trévise, qui « a signalé que le maire Ligue du Nord de la ville avait explicitement demandé que les livres de l’auteur de Gomorra [Roberto Saviano] disparaissent des étagères » [2]. Peut-être parce que Saviano, l’auteur anti-mafia, animateur de l’émission de télévision Vieni via con me, s’est opposé récemment au ministre de l’Intérieur Roberto Maroni, membre de la Ligue du Nord.
Des lois toujours plus racistes et intolérantes
Pour Roberto Ferrucci, écrivain et journaliste italien, la Vénétie est devenue depuis longtemps « l’atelier où expérimenter une nouvelle forme de "démocrature" ». C’est de là que « partent toujours les lois les plus racistes, intolérantes. C’est ici que le pouvoir expérimente ce à quoi il peut arriver. Et, chaque fois, il arrive toujours un peu plus loin, il ose toujours un peu plus », s’indigne-t-il dans une Lettre ouverte, publiée par Télérama. « Fahrenheit 451, vous vous souvenez ? Bon, en Italie on y est. La Vénétie est l’image de ce que sera le post-Berlusconi : quelque chose de bien pire et dangereux. Et tout ça se passe dans l’indifférence presque totale d’un pays habité par des gens devenus idiots après une trentaine d’années de télévision berlusconienne. »
Daniel Pennac, Bernard-Henri Lévy, Fred Vargas, Enki Bilal ou Albert Jacquard se sont opposés en 2004 à l’extradition de Cesare Battisti par la France. Leur ouvrages seront-ils bientôt bannis d’Italie ?