Les Echos. 7 février 2011 par Vincent Collen (merci à C.M.)
La Cour des comptes épingle la campagne de vaccination contre la grippe A (H1N1). Elle a coûté de 680 à 760 millions d'euros, au moins 140 millions de plus que l'estimation du gouvernement.
Un an après l'épidémie de grippe A (H1N1), la polémique sur le coût de la campagne de vaccination rebondit. Dans un rapport qui vient d'être remis au Sénat, la Cour des comptes estime qu'elle a coûté entre 685 et 756 millions d'euros. Soit de 137 à 208 millions de plus que l'estimation du gouvernement, faite par la Direction générale de la santé (DGS) en septembre dernier.
Comment s'explique un tel écart ? D'abord, la Cour comptabilise les vaccins donnés à l'OMS (87 millions d'euros), contrairement au gouvernement. « Ce choix paraît logique, commente le sénateur UMP Alain Milon. Si ces vaccins n'ont pas été utilisés en France, il reste qu'ils n'auraient pas été acquis en l'absence de pandémie. » La Cour tient aussi compte des achats de masques de protection pour les agents de l'administration (39 millions). Elle retient enfin une évaluation plus élevée de l'indemnisation des professionnels de santé libéraux mobilisés (avec un écart maximal de 72 millions).
« La campagne apparaît particulièrement coûteuse au regard du nombre de personnes vaccinées », critique la Cour des comptes. Il y en a eu 5,4 millions, « soit moins de 8,5 % de la population totale ». Cela aboutit à un coût de plus de 110 euros par personne vaccinée.
Le prix d'achat des vaccins était très élevé. « Du fait d'une coordination européenne à peine esquissée, les laboratoires pharmaceutiques sont parvenus à mettre les Etats en concurrence et se sont placés en position favorable pour contracter », notent les sages de la Rue Cambon.
Pendant la négociation, au printemps 2009, les pouvoirs publics ont privilégié les dates de livraison - il fallait disposer le plus vite possible des vaccins -, et au contraire « cédé sur la contrainte de prix ». Or « l'importance qu'a prise la contrainte de calendrier est difficilement compréhensible », poursuit la Cour, car les experts étaient déjà convaincus que le virus arriverait très tôt sur le territoire français et que la vaccination interviendrait de toute façon trop tard pour jouer son rôle de « barrière ».
La Cour ne reproche pas directement au gouvernement d'avoir commandé trop de vaccins, mais elle s'étonne qu'il n'ait pas revu sa stratégie vaccinale à la fin de l'été 2009 étant donné le bilan « rassurant » de l'épidémie dans l'hémisphère Sud et le « retournement d'opinion ».
Les sondages montraient qu'une majorité de Français ne voulaient pas se faire vacciner. « Du fait de la désaffection de la population, l'offre de vaccination dans les centres a été largement surdimensionnée, mobilisant des équipes médicales, infirmières et administratives pendant des journées où peu de vaccinations étaient effectuées, ce qui a été source de coûts importants et de démotivation des équipes. » La Cour estime que les hôpitaux auraient pu jouer, aux côtés des centres de vaccination, « un rôle beaucoup plus important », ce qui aurait réduit le coût de la campagne. Elle note aussi « un important gaspillage » de vaccins du fait de leur conditionnement par doses de dix. Quelque 2,7 millions de doses ont été gâchées, « soit la moitié environ de celles qui ont été effectivement utilisées pour la vaccination ».
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