Owni. Le 11 Mai 2011 par Sylvain Lapoix (publié par Marie)
La loi sur les gaz et huiles de schiste avait d’abord vocation à « abroger les permis » de gaz et huiles non conventionnels accordés en France. Finalement, elle ne fera qu’interdire l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures par la fracturation hydraulique. « Que ça », c’est déjà pas mal, estimeront certains : les débats à l’Assemblée nationale qui ont traîné jusqu’à une heure du matin passé mardi 10 mai ont accouché d’un compromis se concentrant sur la « fracturation hydraulique ». Or, c’est bien là que le bât blesse : la seule garantie de préservation de l’eau et de l’environnement tient dans ce mot. Au delà, les industriels retrouvent toute liberté.
… il se focalise uniquement sur ceux impliquant « des forages suivis de fracturation hydraulique de la roche ». Autrement dit: jusqu’au forage, tout est permis. Et au delà, ce n’est que la fracturation hydraulique qui est interdite.
… elle ne rend illégale que « la fracturation hydraulique ». Pour reprendre la formule d’Yves Cochet, il suffit de renommer la méthode « Kärcher sous-terrain » et les industriels peuvent reprendre tranquillement leur exploitation! Comme nous l’avions relevé dans notre décryptage, un amendement du groupe SRC proposait pourtant d’interdire également « toute autre technique nécessitant d’injecter dans la roche-mère des adjuvants chimiques ou une quantité d’eau importante ». Mais c’est le camp de « l’innovation » technologique qui a remporté la manche, suivant l’idée selon laquelle le législateur doit laisser aux exploitants la liberté de développer d’autres méthodes.
… le terme « non conventionnels » ayant disparu, les explorations et exploitations prévues au large de la Côte d’Azur ou de la Guyane restent parfaitement légales.
… tombant également sous le terme « non conventionnel », les schistes bitumineux ne sont ni mentionnés, ni visés par cette loi, alors même que la France pourrait comporter sur son territoire certains sites exploitables. Parmi les techniques d’extraction, on peut énumérer le « strip mining » et le « open pit mining » (constistant à trépaner des montagnes où est enfermée la ressource) ainsi que le “true in-situ process” (TIS) par lequel le pétrole non « finalisé » est chauffé en profondeur avant d’être extrait. Autant de façon d’éviter toute forme de fracturation hydraulique tout en assurant une production pétrolière extrêmement nocive pour l’environnement.
… elle prévoit même dans son quatrième article des expérimentations « à seules fins de recherche scientifique sous contrôle public ». Autrement dit, c’est l’État lui-même qui réalisera les tests nécessaires au développement de nouvelles techniques d’exploitation des hydrocarbures non conventionels.
… le rapport cité plus haut ne vise qu’à établir un suivi de « l’évolution des techniques d’exploration et d’exploitation et la connaissance du sous-sol français, européen et international en matière d’hydrocarbures liquides ou gazeux. » En clair, il s’agit avant tout de connaître l’état actuel des réserves de pétrole et de gaz, ainsi que les derniers développements techniques disponibles en la matière. Tout ça, certainement, dans la très louable intention d’assurer « la souveraineté énergétique du pays ». En clair, comme l’a si bien dit Greenpeace : reculer pour mieux forer.
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