Rue89. 13 juin 2011 par Dr Richard Horowitz, mis en ligne par Bluboux
Roselyne Bachelot, ministre des Solidarités et de la Cohésion sociale, a affirmé ce 8 juin sur Europe 1 que « depuis le début du quinquennat de Nicolas Sarkozy, […] la scolarisation des enfants handicapés [et] le nombre des auxiliaires de vie scolaire [ont] augmenté », pour passer de 130 000 à plus de 210 000 élèves en milieu ordinaire. (Voir la vidéo)
Mais quelque 1 500 classes doivent fermer dès la prochaine rentrée dans le primaire, et probablement autant dans le secondaire.
Dans cette débâcle annoncée, que deviennent les enfants et adolescents handicapés, les élèves en difficulté et les jeunes patients en souffrance ? Ils avaient pourtant été « promus » grande cause nationale il y a peu.
Souvenez-vous : en 2002 et 2005, des lois avaient, entre autres, érigé en doctrine officielle l'intégration – on dit maintenant « inclusion » – scolaire pour tous. Elles promettaient :
Ce que réclamaient depuis des lustres les associations de parents d'enfants handicapés semble (semblait ? ) enfin acquis et leur (juste) revendication d'une scolarité pour tous, finalement prise en compte.
Pour compléter, le décret du 2 avril 2009 organisait de manière précise et détaillée la coopération entre établissements scolaires et établissements de soins médico-sociaux .
L'indispensable liaison entre soins et éducation n'est pourtant pas une nécessité dont on aurait pris conscience récemment. Le CMPP (centre médico-psycho-pédagogique) Claude-Bernard à Paris, co-fondé en 1946 par le ministère de la Santé et celui de « l'instruction publique », a toujours été novateur sur le sujet.
Il prit en charge des milliers d'enfants alors taxés d'« inadaptés » et forma nombre de spécialistes réputés. Les personnels issus de l'Education nationale y apportent depuis, à des enfants et adolescents pour lesquels la souffrance se double d'un parcours scolaire erratique, tout un savoir-faire, constamment mis à jour.
En même temps, ils sont les garants d'une synergie permanente entre école et équipe thérapeutique du CMPP, pour le plus grand bénéfice des jeunes patients.
La pertinence et l'efficacité réelles de ce dispositif original font qu'il a inspiré de nombreuses vocations et qu'actuellement notre pays dispose d'un réseau de plus de 400 CMPP, s'occupant de quelque 200 000 enfants.
Malheureusement, la plupart d'entre eux voient désormais leur action mise à mal par la politique de retrait de postes, initiée depuis trois ans. On chiffre ainsi à 200 le nombre de postes « disparus » sur cette période.
Malgré son prestige et sa réputation, Claude-Bernard lui-même vient d'en faire l'amère expérience et s'est vu retirer ses derniers enseignants du primaire, en dépit des protestations officielles de la ville de Paris.
Ajoutons à cela :
Parmi ces dernières, les cliniques médico-universitaire Georges-Heuyer (Paris, XIIIe) et medico-pédagogique Dupré à Sceaux (92) viennent de perdre chacune trente heures d'enseignement hebdomadaire alors qu'elles assument le retour dans leur cursus d'adolescents ayant vécu des décompensations psychiatriques graves.
On assiste ainsi à l'abandon de toute cette initiative créatrice et féconde, construite à partir de la rencontre des professionnels du soin et de ceux de la pédagogie.
Prisonnier de sa politique restrictive, le gouvernement taille dans ses effectifs aux endroits qu'il pense peu visibles. Ce n'en est pas moins, souvent, les plus sensibles.
A ponctionner ainsi inconsidérément une articulation essentielle, on risque de la gripper définitivement :
Comme les autres, ils devront se contenter d'une école aux moyens rabotés qui s'avérera encore plus inadaptée pour eux, tandis que, par ailleurs, les moyens de soins à leur disposition auront également été mis à mal.
Comme souvent, les plus fragiles paieront plus.
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