Savez-vous que dans moins de 2 mois, le 7 juin exactement, nous élirons les 78 députés français au parlement européen ?
Peut-être pas. Et pour cause, les grands partis de gouvernement, PS et UMP en tête, ne semblent pas très pressés d’entrer en campagne. Les médias de leur côté restent également très timides sur le sujet, n’organisant aucun débat et ne questionnant presque jamais leurs invités politiques sur leur vision de l’Europe.
Ce rendez-vous électoral est pourtant capital, puisqu’il permettra ou pas de réorienter l’Europe.
Ce désintérêt n’est pas le fruit du hasard.
A notre sens, les partis du Système, emmenés par l’UMP et le PS, n’ont aucune envie que les Français se saisissent du débat européen. Ils conservent un très mauvais souvenir de la dernière fois où cela s’était produit, c’était en 2005 au sujet d’un certain référendum...
En réalité, le PS et l’UMP font tout pour que l’abstention, conséquence du désintérêt des citoyens, soit la plus forte possible.
En effet, autant il est généralement difficile d’évaluer l’impact de l’abstention lors d’un scrutin national classique, autant il apparaît que pour les élections européennes, elle favorise nettement les partis du Système, ceux qui défendent le statu quo européen et votent systématiquement les Traités et les directives. A contrario, lorsqu’il y a débat, les forces favorables au changement, qui aspirent à tourner la page de l’Europe de Bruxelles, font des scores beaucoup plus impressionnants.
Ainsi, les partis européistes du Système totalisent généralement entre 60% et 70% des voix aux élections européennes (quand l’abstention flirte ou dépasse les 50%), alors qu’ils étaient minoritaires le 29 mai 2005, ne réunissant sur le OUI à la Constitution européenne que 45% des électeurs, dans un contexte de forte participation, l’abstention n’excédant pas 30%.
A partir de cette rapide analyse électorale, on comprend pourquoi le PS et l’UMP visent l’abstention maximale, et organisent dans cette optique le non-débat, avec pour l’heure un certain succès à en croire un sondage de l’Eurobaromètre qui montre que 45% des Français seulement s’intéressent à cette élection.
Certains se demanderont pour quelles raisons le débat se traduit par une montée de l’opposition à cette Europe et un désir de changement ?
Tout simplement parce qu’il permet de mettre en lumière les réalités que l’on cache en temps normal, et de sortir de cette vision moyenne de l’Europe qu’on sert en temps normal aux Français, à savoir un espace de collaboration entre Etats qui rime avec modernité en favorisant la paix, les voyages et qui ferait contre-poids aux Etats-Unis.
Bref, de revenir sur terre et de rompre avec cette Europe bisounours qu’on nous vend en permanence.
En effet, ni les grands médias à fond derrière le OUI en 2005, ni le PS, ni l’UMP n’ont envie que les Français sachent certaines choses sur l’Europe.
Qu’ils sachent par exemple que le plan d’aide français à l’automobile, qui prévoyait en contrepartie des 6,5 milliards d’euros d’aides l’interdiction des délocalisations et l’obligation de travailler avec des PME françaises, a été recalé par Bruxelles, au nom de la sacro-sainte "concurrence libre et non faussée".
Ils n’ont pas envie que les Français sachent que la monnaie unique n’est pas ce succès tant vanté qui nous "protégerait" de la crise. Selon Eurostat en effet, la zone euro est la première du monde à être entrée en récession, un trimestre avant les pays européens hors euro. Elle connaît la récession la plus forte, devant les Etats-Unis, et sort de 10 ans de croissance la plus molle du monde. Seul le Japon, confronté à des difficultés très spécifiques, fait moins bien.
Ils n’ont pas envie que les Français sachent que la législation européenne, élaborée par des commissaires non élus à Bruxelles, représente plus de 80% des lois votés au parlement français depuis des années (81,6% selon une étude menée en 2005 par le ministère allemand de la Justice).
Ils n’ont pas envie que les Français sachent que l’Union européenne est construite sur le modèle d’un grand marché qui favorise en son sein les délocalisations et interdit toute forme de protection.
Ils n’ont pas envie que les électeurs sachent que chaque année la France dépense 3 milliards d’euros de plus que ce qu’elle reçoit de l’Europe (aides agricoles comprises), que ce chiffre n’était que de 1 milliard en 2000 et qu’il grimpera à 7 milliards d’euros par an dès 2013.
Voilà ce que risquerait de révéler une vive campagne sur l’Europe. Et voilà précisément ce dont les partis du Système ne veulent pas.