La crise du logement... et la yourte ?
Agoravox. 1er novembre 2010 par Marcon
A l’heure où tant de personnes éprouvent des difficultés à se loger, les solutions alternatives se développent comme l’habitat en yourte. Les préoccupations financières rencontrent celles d’ordre environnemental et les candidats à ce type d’habitat différent se multiplient. Des milliers de yourtes sont maintenant disséminées sur le territoire en tant qu’habitations principales. Toutefois, leur statut reste bien incertain…
Sophie, préparatrice en pharmacie à temps partiel, divorcée et mère de deux enfants témoigne de la difficulté à louer un appartement suffisamment grand avec ses faibles ressources.
Après de nombreuses recherches de solutions économiquement viables, elle opte pour une yourte de 50 m2 avec mezzanine. Sa nouvelle habitation dont l’intérieur élégant et confortable tranche avec l’idée que l’on peut se faire de ce type d’habitat a priori plutôt rustique, l’a amenée aussi au cœur de la nature.
Contrairement aux yourtes traditionnelles mongoles, sortes de tentes rondes en feutre, sa yourte a été montée avec des matériaux adaptés à notre climat plus humide et est dotée de larges ouvertures. Quand on sait qu’une yourte de 40 à 60 m2 se peut se monter en 2 ou 3 jours suivant le degré de sophistication de l’installation, et coûte entre 6000 et 15000 euros, on se prend à rêver d’un monde où il serait plus simple de s’installer.
Au-delà des aspects financiers, pour la plupart des habitants des yourtes, vivre proche de la nature est l’un des aspects essentiels de ce choix de vie. Qu’ils soient éducateurs, boulangers, informaticiens, acteurs de théâtre… vivre autrement était un désir profond, mais vivre autrement tout en vivant finalement… normalement.
La conscience écologique et le respect de l’environnement font le plus souvent partie de leurs préoccupations. Les panneaux solaires pour l’accès à l’électricité et les toilettes sèches sont des éléments de première importance dans la panoplie des « yourteux » ! Une empreinte écologique bien faible par rapport aux habitations conventionnelles.
Vivre dans l’incertitude
Une difficulté majeure pour ces habitants atypiques concerne l’incertitude inhérente au statut juridique de la yourte qui reste très flou. La majorité des habitants des yourtes se trouve dans un relatif sentiment d’insécurité quant à la pérennité de leur présence sur les lieux qu’ils occupent. En effet, beaucoup résident sur des terrains non constructibles qu’on leur loue ou prête, ou dont ils sont propriétaires. Or, un certain nombre d’entre eux est régulièrement confronté à l’Administration et à son regard plus ou moins tolérant sur ce type d’habitat.
Des collectifs d’entraide se sont créés et tentent de se regrouper. Ils souhaitent une clarification des règles et une prise en compte de la spécificité de cet habitat. Il s’agit, en effet, théoriquement, d’un habitat mobile s’apparentant à une tente et ne nécessitant pas de permis de construire. En revanche, s’il y installation d’un bloc sanitaire et un raccordement au réseau, les choses se compliquent.
En octobre 2009, Noël Mamère, député Vert, avait fait une
proposition de loi afin, entre autres, de permettre la reconnaissance de l’habitat mobile. Proposition rejetée… peut-être trop avant-gardiste !
Vers un durcissement de la loi sur l’habitat mobile ?
Malgré les efforts des collectifs et associations et de certains politiques pour faire évoluer la législation en faveur de l’habitat alternatif choisi, les orientations actuelles semblent aller au contraire vers une précarisation du statut des habitants « différents ». C’est en tout cas la crainte exprimée par une partie des « yourteux ».
En effet, l’article 32 ter A de la proposition LOPPSI 2 (Loi d’Orientation et de Programmation pour la Sécurité Intérieure) prévoit une procédure beaucoup plus simple d’expulsion d’habitants de lieux atypiques. Actuellement, cette mesure nécessite l’intervention du juge. Si la loi est adoptée, le préfet pourra faire expulser les habitants sans jugement, contre l’avis même du propriétaire des lieux, pour des motifs d’atteinte grave à la salubrité publique, à la sécurité publique et à la tranquillité publique. Pour le Dal, association qui milite pour le droit au logement, il s’agit d’une
mesure arbitraire dans la mesure où ces notions sont extensibles et floues et laissent la place à beaucoup d’interprétations. Les associations et collectifs concernés appellent à la mobilisation devant l’Assemblée nationale début novembre.
Dernière mise à jour de cette page le 02/11/2010