Inf'OGM. Le 17 septembre 2010 par Christophe Noisette et Eric Meunier
La Commission européenne a proposé de fournir aux États membres des outils pour interdire ou restreindre la culture de PGM sur leur territoire. La balle est maintenant dans le camp du Parlement et du Conseil européen. Le 10 septembre 2010, le Parlement européen a nommé comme rapporteur sur cette proposition [1], la députée Corinne Lepage, membre de l’Alliance des Démocrates et des Libéraux pour l’Europe (ALDE). Pour la députée européenne, « c’est une bonne chose que la Commission européenne prenne enfin en compte les revendications des États membres sur les OGM ».
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La proposition en discussion a été présentée officiellement le 13 juillet par le Commissaire à la santé et aux consommateurs, John Dalli, qui a récupéré l’ensemble du dossier OGM [2]. Pour José Manuel Barroso, Président de la Commission, il s’agit avec cette proposition « d’adopter un système d’autorisation de l’UE, fondé sur des données scientifiques, tout en laissant la possibilité aux États membres de décider s’ils souhaitent ou non la présence de cultures génétiquement modifiées sur leur territoire ». La formule utilisée paraît simple. Pourtant, elle soulève de nombreuses questions, dont se fait l’écho Corinne Lepage : « Les questions liées à la sécurité juridique dont ont besoin les États, les agriculteurs, les industriels et les associations, [elles-mêmes liées] aux conditions de fonctionnement du marché intérieur, [et] à l’application des conclusions du Conseil des ministres de l’Environnement de décembre 2008 sur l’amélioration de l’évaluation des risques sanitaires et environnementaux, sont des éléments qui doivent évidement être pris en compte pour apprécier cette proposition ». En résumé, Corinne Lepage « entend faire en sorte que cette proposition soit l’occasion d’un vrai débat de fond au Parlement ». Attendu sur ce dossier, José Bové s’est réjoui de la nomination de Corinne Lepage. Interrogé par Inf’OGM, il considère notamment « très intéressant que cela soit quelqu’un de l’Alliance des Démocrates et des Libéraux qui porte ce travail ». Le fait que Corinne Lepage soit une députée libérale aura un impact plus important, précise le député d’Europe Écologie. Cette proposition de John Dalli est facilement attaquable à l’OMC et entraînera une distorsion de concurrence entre les agriculteurs biologiques des États membres. Une critique libérale de cette proposition sera plus crédible. Le député européen espère que les discussions montreront que « la proposition de Dalli n’est conforme ni aux règles européennes, ni à l’intérêt des agriculteurs conventionnels et encore moins à l’intérêt des agriculteurs bio. Et que au nom aujourd’hui du Principe de précaution et du droit de produire et de consommer sans OGM, la proposition ne règle rien ». Rejoignant Corinne Lepage sur le contenu des discussions à avoir, José Bové espère par ailleurs que l’ensemble de la procédure d’évaluation des PGM pourra être « remise à plat » et réunira des scientifiques « pour faire des propositions concrètes ». Et il conclut : « Dalli a pris l’engagement public, lors du débat d’hier matin [NDLR : lors de la 6° conférence des Régions sans OGM, organisée au Parlement européen], de travailler avec moi […]. On verra si la Commission veut aller jusqu’au bout ou pas ». La position du Parlement européen sur la proposition est maintenant attendue pour début 2011, puisque sur ce thème il s’agit d’une co-décision Parlement-Conseil. Le Conseil européen travaillera également sur le sujet, en vue d’un accord avec le Parlement. Mais en cas de désaccord, il pourra y avoir une deuxième lecture puis le cas échéant, une procédure de conciliation entre Conseil, Parlement et Commission (qualifiée de « trilogue »). Une procédure classique qui risque de prendre plusieurs mois. Du côté français, le gouvernement avait fait connaître sa position lors du Conseil des ministres du 11 juin 2010, par la voix de Jean-Louis Borloo : « Les vingt-sept se sont mis d’accord à l’unanimité en décembre 2008 pour revoir complètement les méthodes d’évaluation et d’expertise qui aboutissent aux autorisations [...] considérant qu’en l’état actuel, le système n’est pas suffisamment rassurant, pertinent. [...] J’attends que la Commission européenne nous dise où on en est. Que l’on puisse ensuite discuter d’une éventuelle autorisation avec subsidiarité [NDLR : plus de latitude dans l’application laissée aux Etats membres] ne me choque pas. Mais il ne s’agit pas de troquer, d’échanger cette subsidiarité contre l’absolue exigence d’un rehaussement des conditions d’expertise » [3].
[1] Communiqué de presse du 16 septembre 2010 [2] Proposition de règlement du parlement européen et du conseil modifiant la directive 2001/18/CE en ce qui concerne la possibilité pour les États membres de restreindre ou d’interdire la culture d’OGM sur leur territoire [3] Gouvernement et société civile déjouent (provisoirement ?) la manœuvre de la Commission européenne sur les autorisations de PGM
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