Mouvements des idées et des luttes. 19 septembre 2010 par Matthieu Le Quang
L’Initiative Yasuní-ITT ou projet ITT (du nom des trois forages d’exploration qui se trouvent dans la zone « Ishpingo-Tambococha-Tiputini ») est une des initiatives du gouvernement équatorien afin de lutter contre le réchauffement climatique. Il s’agit de ne pas exploiter quelque 850 millions de barils de pétrole situés dans le Parc Yasuní, une réserve naturelle qui contient une des plus importantes biodiversités dans le monde. L’exploitation de ce pétrole lourd, de 14 degrés API, pourrait rapporter à l’Etat près de 7 milliards de dollars. L’Equateur possède une économie basée principalement sur la rente du pétrole. Le pétrole représente 22,2% du PIB, 63,1% des exportations et 46,6% du Budget Général de l’Etat, pour l’année 2008. Les réserves de l’ITT représentent environ 20% des réserves totales connues dans le pays. C’est donc une manne financière dont un pays aussi pauvre que l’Equateur ne peut se passer. Pourtant, la proposition du gouvernement équatorien est de ne pas exploiter ces réserves.
Mais en échange, l’Equateur, en partant du principe de coresponsabilité pour les problèmes environnementaux globaux, demande à la communauté internationale une contribution à hauteur de 50% de la manne financière dont il pourrait disposer s’il exploitait ce pétrole. En effet, favoriser la conservation de la biodiversité en Amazonie apporte des bénéfices à l’humanité dans son ensemble. Ainsi, selon le gouvernement équatorien, il est normal de faire appel à la coresponsabilité et donc à la participation d’autres pays, notamment ceux qui polluent le plus. C’est une proposition qui vise à lutter contre le réchauffement climatique et contre la perte irréversible d’une très riche biodiversité ; à empêcher l’émission d’environ 410 millions de tonnes de CO2 ; à freiner la déforestation et la pollution des sols, ainsi que la détérioration des conditions de vie des habitants de la région. Enfin, dans cette partie de l’Amazonie, vivent des peuples en isolement volontaire : les Tagaeri, les Taromenane et éventuellement les Oñamenane. Le projet ITT permettrait à ces peuples de survivre dans le respect de leur volonté d’isolement.
Cette initiative a été pensée par des acteurs de la société civile équatorienne (associations écologiques, organisations indigènes, mouvements sociaux, etc.) dont certains sont arrivés au pouvoir après l’élection de Rafael Correa en 2006. C’est notamment le cas d’Alberto Acosta qui, en tant que ministre de l’Energie et des Mines, a porté ce projet au niveau politique. Aujourd’hui, l’Initiative Yasuní-ITT est un projet prioritaire du gouvernement équatorien tant pour sa politique extérieure comme environnementale et se propose d’être une alternative au Protocole de Kyoto pour affronter les changements climatiques. Elle ne se limite en effet pas à proposer la réduction d’émission de gaz à effet de serre mais d’éviter des émissions. De fait, ce projet puise dans les principes du Protocole de Kyoto et dans certains de ses mécanismes mais va plus loin en demandant une indemnisation afin de protéger la biodiversité d’une partie importante de l’Amazonie.
Avec le projet ITT, le gouvernement équatorien veut montrer le nouveau modèle de développement que doit suivre le pays. Ce modèle est basé sur le respect des droits de la nature (reconnus dans la nouvelle Constitution de 2008), l’équité sociale et l’utilisation de manière soutenable des ressources. Cette nouvelle vision implique de rompre avec la vision anthropocentrée du développement et s’appuie sur des concepts qui viennent principalement du mouvement indigène : le « Sumak Kawsay » ou « Buen vivir » (« Vivre bien »).
Le 3 août dernier, une étape cruciale a été franchie afin que l’Initiative Yasuni-ITT puisse être mise en œuvre : la signature, entre le gouvernement équatorien et le PNUD, du fond financier chargé de collecter l’argent qui permettra à cette utopie de devenir réalité. Le capital du Fond Yasuni-ITT sera investi exclusivement dans le développement de sources renouvelables d’énergie hydraulique, géothermique, éolienne ou solaire avec comme objectif un changement de la matrice d’offre énergétique et productive réduisant l’utilisation des combustibles fossiles. Les intérêts du Fond seront, eux, destinés principalement au projets suivants : éviter la déforestation et conserver de manière effective 44 Aires protégées qui correspondent à 4,8 millions d’hectares soit 20% du territoire équatorien ; la reforestation et la régénération naturelle d’un million d’hectares de forêt dont les sols sont actuellement menacés par la dégradation (réduisant le taux de déforestation de l’Equateur, un des plus hauts d’Amérique du Sud) ; le développement social des zones d’influence de l’Initiative avec l’investissement dans l’éducation, la santé, l’habitat et dans la création d’emplois dans des activités soutenables comme l’écotourisme ; dans la recherche et le développement en science et technologies avec comme objectif, à moyen/long terme, un changement de modèle de développement pour aller vers une société de la bioconnaissance. Il s’agira ici d’expliquer comment a été imaginée cette idée, chez certains acteurs de la société civile équatorienne, d’ériger le fait de laisser le pétrole sous terre en politique publique pour l’Etat équatorien en partant notamment de l’analyse des conséquences de la forte exploitation du pétrole en Amazonie. Nous verrons aussi en quoi le projet ITT constitue une innovation dans les politiques environnementales en associant à la fois lutte contre le réchauffement climatique, maintien de la biodiversité et réduction de la pauvreté et de l’iniquité. Enfin, nous étudierons le modèle alternatif de développement sur lequel l’Equateur semble s’orienter avec cette initiative.
Les conséquences de la forte exploitation du pétrole en Amazonie
L’ouverture de la frontière pétrolière, si l’exploitation du bloc ITT est décidée, suppose la création d’un nouveau pôle pétrolier, avec des conséquences qui sont déjà très bien documentées dans les zones déjà exploitées depuis la fin des années 1960, notamment dans le nord de l’Amazonie. Ces impacts peuvent se résumer en cinq catégories. Tout d’abord, il y a des dommages environnementaux engendrés par l’exploitation pétrolière en général comme la pollution des sols, des rivières et de l’air mais aussi la déforestation due à la construction des routes et à l’installation des infrastructures. Tout cela crée une altération des relations à l’intérieur des écosystèmes et dans le cas spécifique de la zone ITT, entrainerait, sans possibilité de retour, la destruction d’une très riche biodiversité, l’équilibre écologique du parc Yasuni étant très fragile. L’exploitation aurait aussi des impacts économiques à la fois pour les populations locales avec la perte de la productivité des économies d’auto-subsistance mais aussi pour les entreprises pétrolières avec des coûts élevés de sécurité, de gestion de l’exploitation et des déchets générés, et de compensation. De plus, l’investissement pour l’extraction de ce pétrole lourd coûterait 3,5 milliards de dollars environ [1]. Les impacts sociaux ont aussi été très importants dans les zones d’exploitation pétrolière en Amazonie : alcoolisme, violence entre colonos et communautés indigènes, violence à l’intérieur même des communautés, prostitution, maladies, violences sexuelles, etc. Il en résulte de forts impacts culturels, notamment sur la vie des peuples locaux avec la destruction du tissu social communautaire, la migration vers d’autres territoires et l’extinction de cultures entières. Enfin, cela engendrerait de véritables problèmes politiques avec l’augmentation des conflits dans la région, une certaine violence transfrontalière (la zone de l’ITT se trouve à la frontière avec le Pérou où existent aussi de grandes réserves de pétrole), et l’abandon de l’Etat dans les zones exploitées. En plus de ces impacts, il faut aussi considérer ceux qui sont directement le fait des activités pétrolières comme l’ouverture de routes avec une exploitation illégale du bois, la colonisation, le tourisme, la bioprospection et d’autres menaces.
Les organisations écologistes et indigènes ainsi que les populations locales connaissent les conséquences que peut provoquer l’exploitation du pétrole, notamment depuis l’expérience de l’activité de la compagnie Chevron-Texaco, entre les années 1960 et 1990. En effet, depuis 16 ans, a débuté un long procès inédit entre Texaco (puis Chevron après son rachat de Texaco) et des centaines de communautés indigènes appuyées par des organisations sociales et de nombreux avocats pour demander des réparations pour ce que les experts reconnaissent comme le pire désastre pétrolier du monde, que l’on appelle maintenant « le Tchernobyl de l’Amazonie » à cause d’une pollution désastreuse laissée par la multinationale Texaco. Quand celle-ci est arrivée dans cette région, le gouvernement lui a concédé un territoire d’environ 1.500.000 hectares de jungle pure où vivaient plusieurs communautés indigènes. A sa sortie en 1992, elle a laissé plus de 17 milliards de galons de pétrole déversés dans la nature et 917 piscines toxiques. Elle a aussi rejeté délibérément 18 milliards de tonnes de déchets toxiques et on estime que plus de 1700 personnes sont mortes des conséquences directes de la pollution [2]. Enfin, Texaco serait coupable d’avoir provoqué la disparition de deux peuples entiers, les Tetetes et les Sansahauris.
C’est à partir de ces longs processus de résistances alimentés aussi par la défense du territoire, la protection de la biodiversité et le maintien des différentes cultures indigènes, que s’est construit la thèse d’un moratoire sur l’expansion de la frontière pétrolière en Amazonie, formulée dans divers forums et espaces et repris dans le livre El Ecuador Post-petrolero [3]. Cette thèse du moratoire a pris de plus en plus d’importance et a été affinée au sein de la société civile équatorienne notamment par les organisations telles qu’Acción Ecológica, Oilwatch ou la fondation Pachamama. Les grandes lignes de l’Initiative Yasuní-ITT ont été discutées et définies avant l’arrivée de Rafael Correa à la présidence de la République. Déjà le 13 décembre 2006, Esperanza Martínez a présenté un mémorandum au futur ministre de l’Energie et des Mines, Alberto Acosta, dans lequel elle synthétisait les principes et les bases de cette proposition.
C’est donc dans ce contexte et à partir d’une proposition de la société civile que se met en place l’initiative du gouvernement équatorien qui consiste à laisser sous terre le pétrole de l’ITT.
Du projet politique à la politique publique
La thèse du moratoire fait partie du Plan de Gouvernement 2007-2011 de Movimiento País, devenu depuis Alianza País, le mouvement politique de Rafael Correa. Ce plan a été élaboré en 2006 et reprend les débats sur la passage à une économie post-pétrolière avec comme objectif de mettre un terme aux structures archaïques de développement du pays qui datent du XIXème siècle c’est-à-dire d’être un pays primario-exportateur (cacao, café, bananes, crevettes, pétrole). Cela part d’une analyse simple : depuis le début de l’exploitation du pétrole en Amazonie à la fin des années 1960, plus de 4 milliards de barils ont été extraits et le pays a reçu plus de 90 milliards de dollars de cette rente. Pourtant, les provinces amazoniennes enregistrent les plus hauts taux de pauvreté de tout l’Equateur et ce sont celles où se trouve le pétrole qui sont les plus pauvres de cette région. Selon le nouveau gouvernement et surtout Alberto Acosta, le pétrole n’a pas contribué à développer le pays et il est donc urgent de penser à un développement alternatif. De plus, comme nous l’avons vu précédemment, l’extraction du pétrole en Amazonie a, directement et indirectement, conduit à détériorer les conditions environnementales et sociales de la population amazonienne et entraîné une terrible déforestation, érosion, contamination du sol, de l’eau et de l’air.
Après un conflit [4] entre le ministre de l’Energie et des Mines et aussi président du Directoire de Petroecuador [5] et le président exécutif de Petroecuador, Carlos Pareja Yanuzzeli à cette époque, cette initiative, a été présentée officiellement le 5 juin 2007 par le gouvernement et est devenue un des projets centraux de la Révolution citoyenne. Une commission dépendant du ministère des Relations Extérieures a été crée par le décret exécutif nº 1227, le 29 juillet 2008, et a impulsé l’initiative au niveau international. Cette commission présidée jusqu’au 11 janvier 2010 par Roque Sevilla, ancien maire de Quito, et appuyée politiquement par Fander Falconi, ministre des Relations Extérieures du 15 décembre 2008 au 12 janvier 2010, a permis de renforcer théoriquement le projet [6] et de multiplier les visites internationales (notamment dans divers pays européens et aux Etats-Unis). Depuis son lancement public, le projet ITT a rencontré de nombreux obstacles, notamment avec les menaces et les dates butoirs présentées par le président Correa : « si la communauté internationale ne veut pas contribuer financièrement au projet, l’Equateur, ne pouvant pas se passer de cette manne financière, sera obligé d’exploiter le pétrole », répète-t-il souvent.
La crise la plus importante a eu lieu le 12 janvier 2010 avec la démission de Fander Falconi, un pilier du gouvernement mais aussi du processus politique en cours en Equateur, démission qui faisait suite à celles de certains membres de la commission gouvernementale en charge du projet ITT. C’était le résultat de déclarations malheureuses du président Correa lors de son émission radiodiffusée hebdomadaire du 9 janvier au cours de laquelle il a déclaré que les négociations concernant le fonds fiduciaire qui devait être géré par le PNDU étaient « honteuses » et que si la communauté internationale ne voulait pas apporter sa contribution, l’Equateur n’aurait pas d’autre choix que d’exploiter ce pétrole. Même si le président Correa a réaffirmé son soutien à ce projet (preuve en est de la nouvelle composition de l’équipe gouvernementale en charge de ce projet dont plusieurs de ses membres sont des écologistes convaincus et reconnus au niveau international), les différentes pressions venant notamment du lobby pétrolier qui veut exploiter ce pétrole restent importantes.
Il n’en reste pas moins que cette initiative continue et qu’elle suscite beaucoup de débats et d’espoirs notamment en ce qui concerne le nouveau modèle de développement qu’elle évoque et parce qu’elle donne de nouvelles perspectives dans la lutte contre le réchauffement climatique.
Articulation entre la lutte contre le changement climatique et la justice sociale
La transition vers une société post-pétrolière ainsi que l’articulation entre la lutte contre le changement climatique et la justice sociale sont aujourd’hui devenues nécessaires, en Equateur en particulier, pour plusieurs raisons. L’économie équatorienne reste fortement dépendante de l’extraction des ressources naturelles, surtout du pétrole, et de l’exploitation de son patrimoine naturel. Cette économie primo-exportatrice, qui entraîne des impacts sociaux et environnementaux très importants comme nous avons pu le voir plus haut, a maintenu de hauts niveaux de pauvreté et d’inégalités. Selon l’INEC, en décembre 2009, l’Amazonie en général est la deuxième région la plus pauvre d’Equateur derrière la province de Bolivar, avec 59% de la population en situation de pauvreté, bien au-dessus de la moyenne nationale qui est de 36%. Pour avoir une étude plus précise des indicateurs sociaux dans le pays, il faut se servir du dernier recensement de 2001 et regarder les chiffres correspondant aux provinces du nord de l’Equateur qui sont les provinces les plus touchées par l’exploitation pétrolière. Les indices de pauvreté sont les plus hauts avec 84,2% pour la province de Sucumbios et 80,2% pour Orellana (province où se trouve le parc Yasuní) face au 55% au niveau national à cette période-là. L’accès à l’eau potable est très inférieur aux 48% nationaux : 14% à Sucumbios et 13% à Orellana [7].
Selon Javier Ponce, « L’Amazonie équatorienne réunit deux catastrophes : celle que vivent ses populations, avec des nationalités en voie d’extinction et une pauvreté qui, au début de la décennie, affecte 70% de la population ; et la catastrophe environnementale avec 30% de la forêt originelle totalement dévastée. L’ambition pour contrôler la richesse amazonienne n’a pas eu de limites à travers l’histoire […]. Pour cela, une décision que représente la volonté politique de définir l’avenir de l’Amazonie, est un fait inédit et courageux. » [8]
L’Initiative est très clairement fondée sur la justice environnementale et sociale. L’importance écologique de la zone est indiscutable. En plus d’avoir été déclarée Réserve Mondiale de la Biosphère par l’UNESCO en 1989, les scientifiques reconnaissent que le Yasuní est une des régions ayant la plus grande réserve de biodiversité dans le monde [9] : il héberge pas moins de 165 espèces de mammifères, 150 d’amphibiens, 121 de reptiles, 80 de chauve-souris, 593 d’oiseaux, 2274 d’arbres et d’arbustes et 280 de lianes, sans compter avec d’innombrables espèces d’invertébrés qui n’ont pas encore été étudiées. Sur un seul hectare du Yasuní, il y a 655 espèces d’arbres soit plus que dans les Etats-Unis et le Canada réunis. On trouve aussi plus de 4000 espèces de plantes vasculaires pour un million d’hectares. Le nombre d’insectes est estimé à 100 000 espèces par hectare, soit la concentration la plus forte au monde. A la riche biodiversité, s’ajoute l’importance des communautés humaines ainsi que de leurs cultures ce qui impliquerait un coût social, environnemental et économique très important en cas d’exploitation du pétrole. On se trouve face à des valeurs non mesurables et donc, ici, la dimension environnementale ne peut se dissocier de la dimension sociale. La dette écologique et la justice climatique impliquent de lutter contre la distribution inégale des impacts des désastres du climat mais aussi une meilleure répartition des bénéfices économiques générés par le modèle qui a entraîné ce changement climatique. Les pays du Nord se sont enrichis à partir des ressources naturelles des pays du Sud dont la population reste pauvre et subit les coûts écologiques. La dette écologique est un concept qui permet de « poser la question centrale de la responsabilité historique et de qui doit à qui et pour quoi » [10] et remet en question les relations traditionnelles entre pays riches et pays pauvres. En général, ce sont les riches qui sont les créditeurs et qui exigent le remboursement des pays pauvres mais la dette écologique inverse cette relation : ce sont les pays du Sud qui réclament le paiement de leur dette au nom de la lutte contre le réchauffement climatique. Selon cette logique, la dette climatique se décompose principalement en trois types de dette : la dette d’émissions c’est-à-dire la contamination par les gaz à effet-de-serre [11] ; la dette de développement en partant du principe que les pays du Sud ont le droit aux mêmes possibilités de développement économique que les pays du Nord et donc doivent pouvoir avoir accès aux nouvelles technologies propres pour ne pas augmenter la pollution ; et la dette d’adaptation provenant des différents impacts négatifs subis par la population des pays pauvres (perte des source d’eau, augmentation des maladies, diminution de la production agricole, érosion des sols, etc).
Ce concept de « dette historique écologique » est largement repris par le gouvernement équatorien afin d’obtenir les compensations financières de la communauté internationale. Dans le texte présentant l’initiative [12], le gouvernement équatorien parle de co-responsabilité commune à l’Equateur et à la communauté internationale ainsi que d’une compensation internationale. En effet, selon cette logique, il ne s’agit pas de solliciter une compensation pour la compensation et surtout pas une donation mais une contribution financière vue comme une co-responsabilité partagée, surtout pour les sociétés les plus riches qui sont celles qui ont le plus détruit la planète. Cette compensation internationale « devrait être entendue plus comme une proposition encadrant les politiques internationales qui recherchent la justice climatique, que comme une condition pour protéger la zone, l’Etat reconnaissant comme prioritaire la protection et conservation de la zone, objectif prévu aussi dans la propre législation équatorienne » [13].
En effet, depuis octobre 2008, l’Equateur possède une des législations les plus avancées en matière d’écologie notamment avec l’inscription des droits de la nature dans la nouvelle Constitution.
Les droits de la nature : d’objet à sujet des différentes politiques
L’Équateur est le premier pays dans le monde à reconnaître les droits de la nature. Cette nouveauté a contribué à alimenter de nombreux débats sur les politiques en faveur de la protection de l’environnement que ce soit pendant ou après l’Assemblée constituante de Montecristi en 2008. Ce concept de droit de la nature est souvent décrié car beaucoup pensent que cela signifie la fin des activités extractivistes ou encore l’impossibilité de continuer les activités d’autosubsistance comme dans le cas de la chasse ou de la pêche pour certaines communautés indigènes. Pourtant, les droits de la nature n’impliquent pas cela. « Cette proposition de droits implique que toute activité qui dépende des ressources naturelles pourra se faire si cela n’altère pas l’action téléologique et immanente de la nature, concept philosophique qui définit la capacité des êtres vivants, la nature incluse, de se régénérer ou de se guérir, et de continuer à exister. » [14]
Ce concept a aussi souvent fait l’objet d’ironie comme par exemple la question de la représentation de la nature au cours d’un procès. Pourtant les exemples sont nombreux en droit de personnes qui n’ont pas de volonté, ni de connaissance et qui donc disposent de tuteurs légaux. C’est notamment le cas des enfants et même, en Equateur, des fœtus. Leurs représentants légaux ne sont pas nécessairement leurs parents mais aussi des avocats. De la même manière, la nature pourrait avoir des représentants légaux faisant respecter ses droits et parlant en son nom. Cela pourrait être une personne qui soit directement en lien avec elle mais aussi des représentants d’un collectif ou d’une institution. Certes la nature n’est pas une personne mais d’autres organismes ont les mêmes droits que les personnes. Par exemple, en 1886 (et jusqu’à aujourd’hui), la Cour Suprême des Etats-Unis a étendu les droits humains aux corporations privées : droit à la vie, à la liberté d’expression, etc. Concernant la nature, Esperanza Martínez explique que « la reconnaissance des Droits de la Nature pose, simultanément, le thème de “titularisation” et de “tutelle”. La “titularisation” est la condition d’être sujet de droits propres et la “tutelle” avec qui représente ou rend applicables de tels droits » [15]. Selon elle, la tutelle soit être une institution juridique qui doit favoriser l’exercice de ces droits, les individus et collectifs étant incités à défendre la nature avec l’assistance de cette institution.
Outre ces débats, ce qui est important dans cette nouvelle conception c’est que la nature est ainsi considérée comme un être vivant avec lequel on doit vivre en harmonie et non comme quelque chose à exploiter et à commercialiser. L’être humain fait ainsi partie de la nature et ne doit plus se considérer en dehors d’elle. Il dépend de la nature et a besoin d’elle pour vivre. L’inverse n’est pas forcément vrai : la nature peut exister sans l’humanité. Cette nouvelle conception ne peut concevoir une vision économique de la nature ce qui va nous obliger à la construction d’autres types de relations à la nature en tant qu’individus mais aussi en tant que sociétés. Avec les droits de la nature, on reconnaît des obligations morales pour protéger et respecter l’intégrité des écosystèmes naturels et éviter la pollution environnementale.
Selon Alberto Acosta, « nous pensons que protéger la vie ne peut pas se faire en ayant recours à des relations marchandes. Mettre une valeur monétaire à la nature, en d’autres termes à la vie, ne nous paraît pas être le plus adéquat. » [16] Cette posture réductionniste ne permet pas de prendre en compte d’autres valeurs de la nature comme les valeurs écologiques (la biodiversité), les valeurs culturelles ou alors les valeurs traditionnelles défendues par les populations indigènes, notamment à travers le Sumak Kawsay (ou le Vivre Bien). Le développement actuel a entraîné une crise écologique qui menace toutes ces valeurs avec de graves conséquences sur les écosystèmes à cause du réchauffement global, la perte de la biodiversité, la diminution de la couche d’ozone, la désertification et l’érosion des sols, etc. « En réalité, les Droits de la Nature exigent de faire un bilan entre les usages économiques et la protection de l’environnement. C’est régler les usages économiques sur les rythmes de la Nature, mettre les rythmes d’extraction sur le même plan que la cadence de régénération de la vie. » [17] Pour cela, il est nécessaire de compter avec des politiques écologiques effectives. Ces dernières ne sont pas forcément contradictoires avec la logique économique dans le sens où si on ne protège pas l’environnement, une crise écologique aboutirait à des coûts économiques très forts que ce soit pour la gestion des impacts environnementaux ou pour la faillite de plusieurs secteurs économiques si ceux-ci perdent leur base de ressources naturelles. Elle passe donc d’objet du développement au sein d’une économie extractiviste et d’un modèle de développement ne tenant pas compte du patrimoine naturel, à sujet des différentes politiques publiques. Ainsi l’Initiative Yasuní-ITT doit être considérée comme une politique publique qui respecterait les droits de la nature en incitant les êtres humains à vivre en harmonie avec la nature. Toutefois, ce n’est pas une politique spécifiquement environnementale mais qui prend en compte des éléments économiques et sociaux avec une autre vision du développement remettant en cause le caractère principalement extractif de l’actuel modèle de développement qui dépend de l’exploitation du pétrole et des forêts.
Vers un éco-socialisme ?
Avec l’Initiative Yasuní-ITT, l’Equateur veut asseoir des bases solides pour une croissance économique qui ne dépendra plus du sacrifice du patrimoine naturel du pays. Ce projet apporte une critique radicale du capitalisme et de son mode de développement qui n’est plus viable. Cette critique doit nécessairement prendre en compte l’écologie avec comme objectif la justice sociale. Cette proposition pourrait donc s’inscrire totalement dans ce qu’on pourrait appeler l’éco-socialisme [18]] qui reprend deux concepts politiques, l’écologisme et le socialisme, afin de créer un nouveau modèle de civilisation qui permettrait d’articuler la justice sociale et l’urgence écologique. Cette dernière ne pourra se résoudre qu’en remettant radicalement en cause la société capitaliste dans laquelle nous vivons, les crises économiques, financières, énergétiques et climatiques étant étroitement liées.
La croissance économique n’est pas synonyme de développement et celui-ci ne doit plus être équivalent d’accumulation des richesses, accumulation qui se fait le plus souvent au détriment de la nature. La satisfaction de nos besoins ne doit plus passer par la consommation de biens matériels. La richesse ne peut plus être liée à l’abondance. L’accroissement matériel sans fin nous conduit à de graves risques écologiques et sociaux naissants. On commence donc à comprendre que le mode de développement dominant, capitaliste, n’est globalement pas viable. Des changements structurels dans les moyens de production de biens ou d’énergie sont nécessaires ainsi que dans la société de consommation. Aujourd’hui, on ne peut pas penser la lutte contre le réchauffement climatique sans réfléchir aux structures et aux modèles qui entraînent cette crise écologique. De même, penser la rupture avec le capitalisme et la lutte contre la pauvreté ne peut se faire qu’en prenant en compte l’écologisme politique : ce sont les plus pauvres qui sont les plus vulnérables aux changements climatiques.
Pendant les années 1990, les néo-libéraux criaient victoire et en même temps, la fin de l’histoire. D’autres se lamentaient, avec la chute du mur de Berlin, de la fin des idéologies. Si cela est vrai dans les grands partis de gouvernement à gauche, qui se sont tous alignés sur l’économie de marché et donc sur le néo-libéralisme qui en découle (même si certains proposent quelques réformes sociales à la marge afin d’« humaniser » le marché) et chez certains intellectuels de gauche, on ne peut pas en dire autant du mouvement alter-mondialiste dont les débats, multiples et divers, démontrent, comme son slogan l’indique, qu’« un autre monde est possible ». Il suffit aussi de voir les nombreuses expériences dans les sociétés latino-américaines (notamment en ce qui concerne la participation ou l’autogestion) pour démontrer le contraire. C’est dans cet ensemble que s’inscrit l’Initiative Yasuní-ITT et ce sont dans les luttes à partir des sociétés civiles nationale et internationale qu’elle pourra démontrer non seulement que ce projet est réalisable mais aussi que c’est une première pierre permettant de bâtir un véritable mouvement éco-socialiste au niveau mondial.
Le projet ITT pourrait prouver que le socialisme peut être écologique : mise en place d’une économie post-pétrolière, changement radical de la matrice énergétique et productive (réduisant l’utilisation de combustibles fossiles en les substituant par des formes renouvelables d’énergie hydraulique, géothermique, éolienne ou solaire), arrêt de la déforestation, reforestation avec l’appui des communautés locales, etc. De même, le socialisme peut être démocratique (au contraire des vieux socialismes bureaucratiques comme l’URSS, la Chine, la Corée du Nord ou encore Cuba) avec la participation de la population à la définition de ses besoins réels, à la prise de décision et à la mise en place des différents projets qui la concernent : éducation, santé, habitat, environnement, etc. Il respecterait aussi le choix de deux peuples indigènes, les Tagaeri et les Taromenane, de vivre en isolement volontaire, leur territoire étant dans la zone de l’ITT.
La problématique des peuples indigènes en isolement volontaire (PIAV)
Le projet ITT représente un exemple pour que l’économie post-pétrolière et la justice écologique deviennent réalité. Il nous oblige à penser à un autre type de développement qui ne soit plus fondé sur l’extraction des ressources naturelles, sur la simple accumulation des richesses mais qui prenne en compte une meilleure harmonie de l’être humain avec la nature. Pour cela, la prise en compte de la problématique des peuples indigènes en isolement volontaire est fondamentale. Il s’agit ici de privilégier la vie de ces populations et les droits humains face à l’exploitation pétrolière et à la manne financière qui en résulterait. Ce serait un premier pas afin de penser un modèle alternatif de développement qui ne prenne pas seulement en compte le développement économique.
Les Tagaeri et les Taromenane représenteraient environ 300 personnes divisées en quatre clans. C’est leur volonté de n’avoir aucun contact avec le reste de la société. L’isolement de ces peuples n’est pas un hasard, c’est le résultat d’une décision propre, de processus sociaux, d’une dynamique culturelle propre aux chasseurs-cueilleurs et du processus historique de l’avancée de la frontière de colonisation et de l’exploitation des ressources sur leurs territoires [19]. Les groupes de chasseurs-cueilleurs dépendent totalement des ressources qu’ils trouvent, qu’ils chassent ou qu’ils pêchent sur leur territoire. La question du territoire est fondamentale car, en plus d’être un espace de survie (chasse, pêche, nourriture, etc), sa violation peut être source de guerre ou de violence pour garantir l’irréductibilité ou la différence avec les autres. Le problème de ces peuples en isolement volontaire est étroitement lié à celui de l’exploitation pétrolière et à l’expansion de la frontière extractiviste. Cette dernière a plusieurs conséquences négatives. La déforestation et le bruit des machines provoquent la fuite des animaux et la perte de la biodiversité ce qui pose problème au niveau de la reproduction sociale et culturelle de ces peuples puisque leur économie de chasse et de cueillette dépend totalement des ressources de leur territoire. De plus, ces peuples sont très fragiles par rapport aux maladies qui pourraient arriver avec les colonos (une seule grippe pourrait tuer un peuple entier). Enfin, les risques de violences sont multipliés que ce soit entre peuples isolés eux-mêmes (à cause des déplacements forcés et donc de la lutte pour le territoire), entre ces peuples et les groupes waoranis (de la part des PIAV à cause du territoire ou de la part des Waoranis car la présence des PIAV interdit à certaines communautés waoranis de profiter de ce que leur offrent les entreprises pétrolières [20] ou l’exploitation des ressources naturelles) et entre PIAV et colonos.
Les PIAV bénéficient de différentes mesures de protection. Au niveau international, le traitement de cette problématique est récent puisque sa première expression a eu lieu lors de la réunion de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) à Bangkok en 2004 lors de laquelle a été émise la Recommandation nº3056 en faveur des droits humains et la conservation des territoires indigènes des peuples isolés. En 2005, lors de la première Rencontre Internationale sur les Peuples Indigènes Isolés de l’Amazonie et du Gran Chaco à Belem do Para au Brésil, regroupant différentes organisations de la société civile, l’UNESCO et d’autres organisations de l’ONU, les PIAV ont été déclarés « Patrimoine socio-culturel de l’Humanité », notamment parce qu’ils assurent la conservation de la biodiversité. De plus, la Déclaration de Belem met en avant que la volonté d’isolement doit être considérée comme un « droit humain fondamental ».
Au niveau national, c’est l’Etat équatorien qui a impulsé une politique en faveur des PIAV en créant en 1999 une Zone Intangible (700 000 ha compris entre les fleuves Yasuní et Curaray) qui a été officialisée en 2007 en réponse aux mesures de précaution dictées par la Commission Interaméricaine des Droits de l’Homme. Elle obligeait l’Etat équatorien à mettre en œuvre un plan de mesures effectives de protection pour ces peuples. Mais les frontières de cette Zone Intangible ont été tracées par le ministère de l’Environnement en suivant de manière étrange les délimitations des différents blocs pétroliers (notamment le bloc 16). Ce plan s’est fait sous la pression des entreprises pétrolières et sans la participation des communautés waoranis qui vivent dans la zone, ni celle de la NAWE ou de la CONAIE [21]. Les zones de protection sont très souvent des figures artificielles car elles ne correspondent pas à la territorialité exercée par ces peuples [22]. En effet, il existe le risque que les pressions des industries extractivistes conditionnent la délimitation du territoire. Cela entraîne quelques préoccupations : la non connaissance des limites de cette zone intangible par les peuples isolés et donc la possibilité d’avoir de nouvelles situations de violence en dehors de la zone. La démarcation de la Zone Intangible a surtout répondu aux intérêts pétroliers plus qu’à la territorialité effective des peuples indigènes en isolement volontaire. Il est évident que l’actuelle délimitation de la Zone Intangible Tagaeri-Taromenane ne répond pas à la territorialité exercée par ces peuples. L’ITT fait partie de la Zone Intangible et l’exploitation du pétrole de cette région serait une infraction au droit international et ne ferait qu’aggraver les multiples agressions dont est victime le territoire de ces peuples.
Ce projet porté par divers mouvements sociaux équatoriens et le gouvernement rencontre différents obstacles : le manque d’engagement de la communauté internationale et les secteurs conservateurs ou favorables à l’exploitation du gouvernement de Correa. En effet, malgré les efforts du gouvernement équatorien, ainsi que d’autres personnes en Equateur et dans le monde, la communauté internationale tarde à réagir et à soutenir ce projet. Pour le moment, seule l’Allemagne, à travers son Parlement, s’est engagée à financer ce projet à hauteur de 50 millions d’euros par an, pendant 13 ans, ce qui représente la durée du bénéfice que produiraient l’exploitation et l’exportation du pétrole de l’ITT. D’autres pays, comme la Norvège ou la Suisse, ont aidé à fiancer des études dans le parc Yasuní. Cette initiative a aussi rencontré un écho positif de la part de la Belgique, de l’Espagne ou encore de la France, sans engagement financier pour le moment. Elle bénéficie également du soutien de diverses organisations internationales comme l’ONU, le PNUD, l’OEA, l’UNASUR ou l’ALBA de même que des mouvements sociaux, en plus, bien sûr de plusieurs dizaines de personnalités au niveau mondial.
Le deuxième enjeu est de convaincre Rafael Correa de laisser le pétrole sous terre. Il faut espérer que le Président équatorien, Rafael Correa, ne cède pas devant les fortes pressions des lobbys pétroliers mais aussi qu’il n’inscrive pas le projet dans des modalités propres de l’écologisme néo-libéral (marché de carbone ou mécanismes de développement propres). De plus, il faut espérer que l’Initiative Yasuní-ITT ne devienne pas une monnaie d’échange par rapport à l’approbation d’un accord commercial comme le Traité de libre-échange avec l’Union européenne (l’opposition de droite équatorienne faisant pression pour cela) et que la société civile équatorienne continue à se réapproprier ce projet et y participe (tout comme la société internationale) afin que ce qui est apparu au début comme une utopie devienne réalité. Ceci constituerait un pas important vers la définition d’un véritable Socialisme du XXIème siècle ou ce que certains commencent à appeler « Socialisme du Vivre Bien ».
L’échec du Sommet de Copenhague en décembre 2009 a montré les difficultés des Etats à se remettre en question quant à leur modèle de développement et à présenter de véritables politiques de lutte contre le réchauffement climatique en accord avec les autres pays du monde. Face à cette incapacité à aller au-delà des intérêts nationaux et commerciaux, la proposition équatorienne fait figure d’exception dont beaucoup pensent qu’elle pourrait être un exemple à suivre.
De la réussite de cette initiative dépend sa duplication dans d’autres pays ce qui permettrait d’avoir un véritable impact sur le réchauffement climatique. Pour cela, l’Equateur a défini trois critères/conditions pour que d’autre pays puissent reproduire les mécanismes du projet ITT : 1) Etre un pays en développement. Un des principaux attraits de ce mécanisme est de rechercher simultanément trois objectifs : combattre le changement climatique, maintenir la biodiversité et réduire la pauvreté et l’iniquité. 2) Etre un pays avec une mégadiversité, situé entre les Tropiques du Cancer et du Capricorne où se concentrent les forêts tropicales. Ces pays possèdent la plus grande partie de la biodiversité de la planète. 3) Posséder d’importantes réserves de combustibles fossiles dans des zones de haute sensibilité biologique ou culturelle.
Selon ces trois conditions, les pays qui pourraient reproduire l’Initiative Yasuní-ITT sont la Bolivie, le Brésil, la Colombie, la République Démocratique du Congo, l’Equateur, l’Inde, l’Indonésie, Madagascar, la Malaisie, la Papouasie Nouvelle-Guinée, le Pérou, les Philippines et le Venezuela. Pour ne pas que ces pays rencontrent les mêmes problèmes que l’Equateur dans les négociations avec les pays industrialisés, un instrument financier pourrait être mis en place afin d’alimenter un fond au niveau international : l’impôt Daly-Correa du nom de son inventeur, l’économiste Herman Daly et de son instigateur politique, Rafael Correa. En effet, lors de la réunion de l’OPEP à Ryad, le 18 novembre 2007, lors de laquelle l’Equateur réintégrait cette institution, Rafael Correa a proposé un impôt à la vente de pétrole à la charge de l’OPEP. Suivant la logique d’Herman Daly, l’OPEP pourrait augmenter le prix du pétrole pour y inclure une taxe sur la pénurie de puisard (produit du rejet de CO2 dans l’atmosphère ou les océans) et dédier ces rentrées d’argent au développement durable ou à la lutte contre la pauvreté [23]. L’OPEP administrerait les fonds collectés, suivant des objectifs sociaux et environnementaux, principalement pour financer la transition énergétique dont le monde a besoin ainsi que pour sauvegarder les zones écologiquement fragiles de l’exploitation du pétrole. Cet impôt permettrait donc bien de financer des projets qui ressembleraient à l’Initiative Yasuní-ITT.
[1] « Las sombras se extienden sobre el ITT », El Comercio, Quito, 4 avril 2010.
[2] « Ecuador atentado a la soberania seguridad jurídica de América Latina por fallo de Chevron », Ecuador inmediato, 4 avril 2010 http://ecuadorinmediato.com/Noti cia...
[3] Alberto Acosta et al., El Ecuador Post-petrolero, Quito, Acción Ecológica, 2000
[4] Voir Matthieu Le Quang, « El proyecto ITT en Ecuador : dejar el crudo en tierra o el camino hacia otro modelo de desarrollo. Entrevista a Alberto Acosta », CIP-Ecosocial – Boletín ECOS nº 8, août-octobre 2009, Quito
[5] Petroecudor est l’entreprise publique chargée de l’exploitation du pétrole. C’est donc pour cela que le Ministre de l’Energie et des Mines est président du directoire.
[6] Notamment avec le document officiel présenté en septembre 2009 et intitulé « Yasuní-ITT. Una Iniciativa para cambiar la historia ».
[7] Tous les chiffres cités proviennent du SIISE (Sistema Integrado de Indicadores Sociales del Ecuador).
[8] Javier Ponce, « Reflexiones sobre un sorprendente giro político », Análisis de Coyuntura del Comité Ecuménico de Proyectos, CEP, Quito, avril 2007.
[9] Scientists Concerned for Yasuní National Park, « Letter to the President of Ecuador », 25 novembre 2004 ; Carina Horn, « The Birth of the Mighty Amazon », Scientific American Magazine, New-York, Mai 2006, p. 40-45.
[10] Nicola Bullard, « La deuda climática como una estrategia política subversiva », América Latina en Movimiento, nº454, Quito, avril 2010, p.17
[11] Les pays du Nord qui réunissent 20% de la population sont responsables de 80% des émissions mondiales de gaz à effet-de-serre. Elizabeth Peredo Beltrán, « Sobre las causas estructurales de la crisis climática y la crisis global », América Latina en Movimiento, nº454, Quito, avril 2010, p.2
[12] Ministerio de Relaciones Exteriores, Ministerio del Ambiente, « Yasuní-ITT. Una Iniciativa para cambiar la historia », Quito, 2009
[13] Alberto Acosta, Eduardo Gudynas, Esperanza Martinez, Joseph Vogel, « Dejar el crudo en tierra o la búsqueda del paraíso perdido. Elementos para una propuesta política y económica para la Iniciativa de no explotación del crudo del ITT 
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