BP, entreprise sado-mazout !

Bakchich Info. Le 21 juillet par Doug Ireland

 

Depuis le début de la catastrophe écologique British Petroleum a accumulé les bourdes dans une attitude de mépris général. Retour sur une gestion de crise calamiteuse.

Même les commentateurs peu connus pour leurs saillies drolatiques sont d’accord : depuis le triomphe manqué du « bouchon géant » qui semblait avoir stoppé la fuite du puits de pétrole dans le Golfe du Mexique, les lettres « BP » signifient « Bad Plumber » (mauvais plombier). Quatre heures seulement après que le dôme de confinement a été placé sur le puits, une nouvelle fuite se déclenchait dans un de ses tuyaux. Le 19 juillet, on découvrait une nouvelle fuite que les scientifiques fédéraux soupçonnent être du méthane, un gaz mortel pour la faune et la flore sous-marine.

Pour la communauté scientifique, cette nouvelle fuite remet en cause la stratégie de BP. Le géant pétrolier a en effet décidé de maintenir l’hydrocarbure sous couvercle jusqu’à ce que la fuite soit colmatée de façon « permanente » avec un seul objectif : le profit. Si, comme le souhaitent les autorités fédérales, le pétrole était pompé jusqu’aux navires en surface pour être collecté, on pourrait avoir une idée précise de la quantité que le puits endommagé a déjà versé en mer. Sans aucune preuve, l’estimation est aujourd’hui de 700 millions de litres. La quantité exacte déterminera le montant des amendes que le groupe pétrolier devra payer. Au moins 20 milliards de dollars.

Polémique sur les produits dispersants

Chez BP, le profit détermine tout jusqu’à décider d’une culture bien établie dans l’entreprise : celle d’ignorer les lois. La criminalité de la société ne fait en effet plus de doute depuis le 8 juin dernier quand le Washington Post a obtenu des documents internes du pétrolier révélant qu’il a « méprisé à répétition les lois et règles environnementales risquant ainsi un accident sérieux. »

Ces documents, comme l’écrivait le Post, ont démontré que BP a « bafoué la sécurité en négligeant l’équipement âgé, a fait pression sur ses employés afin qu’ils ne signalent pas les problèmes et a écourté voire retardé les inspections afin de réduire les coûts de production. » Mais le pétrole n’est pas le seul polluant déversé par BP dans le Golfe du Mexique. Depuis le début de la crise, l’entreprise a utilisé deux « dispersants » toxiques Corexit 9500 and Corexit 9527 dont les effets des vapeurs sur la santé humaine sont, au choix : maux de tête, nausées, vomissements, la diarrhée, les douleurs abdominales, difficultés respiratoires, endommagement des poumons, hypertension, dépression du système nerveux central, dégâts génétiques (y compris des mutations), dégâts cardiovasculaire… N’en jetez plus.

Au moins 3 78 50000 litres (1.7 million de gallons) de ces produits ont déjà été diffusés dans le Golfe, grâce notamment à l’administration Obama. En dépit de l’interdiction formelle de l’EPA (L’Agence de protection de l’environnement) de les utiliser, les gardes-côtes fédéraux ont accordé à BP pas moins de 44 dérogations. Grâce à cela, et aux propriétés dispersantes de ces produits, BP a pu soustraire le pétrole aux images des curieuses caméras aériennes de la télévision, car une fois traité, le pétrole a disparu sous la surface.

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Obama est lui aussi éclaboussé par le scandale BP
© Khalid

Comme l’a rapporté la chaîne MSNBC, ces exigences hasardeuses liées à son image et ses relations publiques ont eu des effets néfastes. Selon l’agence de santé de l’Etat de Louisiane, les ouvriers de BP deviennent de plus en plus malades après avoir respiré les vapeurs produites par les « dispersants » toxiques et par le pétrole. Les émissions des deux produits combinés étant encore plus dangereuses pour la santé. En conséquence, BP a ordonné à ses employés de ne pas présenter aux centres médicaux de l’État, mais à ceux de l’entreprise. Dans le même temps, la direction de BP interdisait à ces mêmes salariés, sous peine de devoir prendre la porte, de porter des appareils respiratoires pour se protéger des émanations, avec toujours le même souci, celui de l’image.

La plupart de ces ouvriers de nettoyage sont des pêcheurs et autres victimes mis au chômage après la fuite du pétrole. Ils n’osent donc pas protester de peur de ne plus gagner assez pour nourrir leur famille. Être exposé à ces produits toxiques est pour eux une double peine. Ils ne peuvent pas non plus compter sur le soutien d’Obama. En dépit d’une pétition qui a recueilli les signatures de centaines d’associations et de dizaines d’hommes politiques, la Maison Blanche a refusé d’exiger de BP que ses ouvriers soient munis de respirateurs.

No pasaran

Le cynisme toxique de BP ne s’arrête pas là. Depuis des mois, le géant pétrolier refuse en effet systématiquement aux médias l’accès aux sites de nettoyage. Inutile d’espérer décrocher une interview d’un ouvrier qui y travaille ou de prendre quelques images des oiseaux couverts de pétrole. Et pour s’assurer d’une interdiction efficace, BP a embauché une société privée, Talon Security, dont les gros bras veillent à la quiétude des lieux. Avec, bien souvent, comme l’a rapporté la presse, l’aide de la police locale, des gardes côtes fédéraux, et même des agents du DHS (le ministère fédéral de la Sécurité) !

Contraires aux promesses de BP, qui assure que tout sera revenu à la normale dans 2 ans, les effets du désastre risquent d’être encore ressentis dans plusieurs décennies. Si la plupart du pétrole reste submergé pour l’instant, de vastes zones côtières sont déjà touchées. 528 kilomètres en Louisiane, 179 km dans le Mississipi (ce qui correspond à presque toute la côte de l’Etat), 108 km en Alabama et 111 km en Floride. Les scientifiques fédéraux ont prédit en plus que la pollution s’étendra éventuellement du Texas et à l’ouest jusqu’à la côte Atlantique de la Caroline du Nord.

Selon les meilleures estimations, le puits de BP a déjà déversé dans le Golfe 34 fois la quantité de pétrole que le naufrage de pétrolier Exxon Valdez a dispersé en 1989 sur les côtes de l’Alaska où la pêche au hareng, principale industrie de l’économie, a été anéantie et où de nombreuses personnes souffrent des produits dispersants diffusés à l’époque. Autre comparaison : le désastre pétrolier de 1970 sur les côtes du Yucatan, dans le Mexique. 378.000.000 litres de pétrole y avait été déversés. Les huîtres et les palourdes, aliments de base de l’économie locale ne sont jamais revenues. Et des nappes de goudron de l’époque sont régulièrement découvertes sur les côtes du Yucatan, mais aussi du Texas. 31 ans après…

Le mode de vie des pêcheurs des marais de la Louisiane, qui depuis presque 300 ans nourrissent la population Cajun francophone, semble avoir été détruit à jamais.

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Dernière mise à jour de cette page le 21/07/2010

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