Bouclier fiscal : de plus en plus injuste, immoral et ruineux

Plume de Presse. 9 juillet par Olivier Bonnet

Le rapport pour 2008 a été présenté à l’Assemblée


bouclierLe 2 juillet dernier a été présenté à l’Assemblée nationale le rapport annuel pour 2008 du député UMP Gilles Carrez, rapporteur général de la Commission des finances, concernant "l’application des mesures fiscales contenues dans les lois de finances et dans la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat" - décidément, le titre de cette loi est toujours aussi hilarant ! On a peu parlé de ce rapport. Pourtant, tant que les dispositions iniques de cette loi TEPA seront en vigueur, il ne faut pas lâcher les sarkozystes avec ça : contre eux qui prétendent faire de la pédagogie pour expliquer leurs "réformes", il faut retourner cette arme. Et dénoncer sans relâche le bouclier fiscal pour ce qu’il est : une monstruosité coûteuse, injuste et immorale. Rappelons que ce dispositif est censé lutter contre l’évasion fiscale. Or un rapport du conseil des prélèvements obligatoires, organisme rattaché à la Cour des comptes, chiffre très exactement les pertes occasionnées par les départs de France de contribuables, comme relevé par Politique.net : en 2006, ils furent 843 à quitter le pays, pour un manque à gagner dans les caisses de l’Etat de 17,6 millions d’euros. Et combien coûte le bouclier fiscal ? 246 millions d’euros en 2007 et, nouveau chiffre divulgué par le rapport Carrez, 578 millions en 2008 ! On voit bien que le remède est infiniment pire que le mal. 

Qui sont donc les heureux bénéficiaires de ces presque 600 millions d’euros ? Ils sont en tout 18 893 foyers. "Le rapport montre que ce système joue de plus en plus un rôle, foncièrement injuste, de prime fiscale à la fortune, indique L’Humanité. Le renforcement du bouclier (passage du plafond de 50% à 60%) a «  accentué la prépondérance des assujettis à l’ISF dans gcle coût du dispositif, mais a aussi augmenté leur proportion en nombre de bénéficiaires  ». Ils représentaient l’an dernier « 40% des bénéficiaires, contre 25% l’année précédente, et concentraient 99% du coût, contre 91% en 2007  », indique Gilles Carrez. À eux seuls, cent contribuables ont touché le tiers du montant total du bouclier, pour une restitution moyenne de 1,15 million d’euros. «  Les plus gros bénéficiaires des restitutions sont essentiellement les contribuables qui se situent dans les tranches supérieures de l’ISF  », doit constater le rapporteur. Vingt contribuables battent une espèce de record : détenteurs d’un patrimoine supérieur à 15 581 000 euros, mais affichant un revenu fiscal de référence de… moins de 3 263 euros, ils ont reçu du fisc un chèque d’un montant moyen de 286 000 euros. Gilles Carrez a indiqué avoir demandé à Bercy des informations complémentaires sur ces cas pour comprendre ce qui paraît invraisemblable - la juxtaposition d’une si grosse fortune et d’un revenu si ridicule - et qui relève sans doute des nombreuses exonérations à la disposition des nantis." En résumé donc, plus ça va, plus ce sont les plus riches qui bénéficient de ce mirifique cadeau au détriment des finances publiques, dont le déficit est par ailleurs utilisé pour justifier les économies censément jpbnécessaires, obtenues par exemple en supprimant des postes de fonctionnaires. La conclusion au député apparenté PCF Jean-Pierre Brard, évoquant le cas de l’Angleterre où, à cause de la non-fiscalisation, "les patrimoines ont pu se transmettre au fil des siècles sans être entamés. Bientôt, chez nous aussi, ceux qui sont nés avec une cuillère en or dans la bouche en transmettront deux à la génération suivante, sans avoir eu à faire aucun effort pour faire prospérer un patrimoine dont vous leur aurez assuré la conservation sans qu’ils aient besoin de travailler." Dire que Sarkozy prétend défendre la valeur travail quand, avec une monstrueuse hypocrisie, il n’a de cesse de favoriser les rentiers !

Enfin, l’hebdomadaire Marianne s’est amusé à comparer RSA et bouclier fiscal : "D’un côté, un milliard et demi d’euros en plus pour le RSA, pour les pauvres donc à en croire la propagande gouvernementale, soit 3,4 millions de personnes. Une dépense annuelle de 441 euros en moyenne par personne. De l’autre, 578 millions d’euros de coût annuel pour le bouclier fiscal, pour les riches donc (...), soit 18 893 personnes concernées. Une dépense de 30 593 euros en moyenne par personne, soit près de 70 fois plus. Manifestement, même en temps de crise,le gouvernement est plus soucieux des finances des riches que de celles des pauvres. En même temps, cela parait logique : il tire ses voix davantage des classes aisées que des r’mistes, euh pardon, des R’sistes." Voilà bien la motivation de la droite avec cet inique bouclier fiscal : choyer son électorat. Le hic, c’est qu’il devrait peser peu de poids en rapport avec le reste des Français, ceux qui peinent à joindre les deux bouts, voire basculent dans la précarité et la pauvreté. Quel immense gâchis de voir une partie des classes populaires voter contre son camp ou bien s’abstenir, faute peut-être d’une alternative crédible à gauche. D’où la nécessité d’une vraie force pour jouer ce rôle, que nous espérons se voir constituée autour du Front de gauche, renforcé par un rapprochement avec le NPA et les écologistes progressistes. Rêve-t-on ?

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Dernière mise à jour de cette rubrique le 10/07/2009