Le Monde | 02.07.09 | 09h19
C'est le tableau le plus exhaustif de l'état de la biodiversité planétaire, brossé tous les quatre ans par l'Union mondiale pour la conservation de la nature (UICN), et il n'est pas brillant. Son édition 2009, publiée jeudi 2 juillet, confirme l'effondrement du nombre des espèces à un rythme cent à mille fois plus rapide que lors des grands épisodes d'extinction du passé.
"Nous ne pouvons que constater que la communauté internationale, qui, en 2002, avait fixé pour objectif de freiner cette tendance d'ici à 2010, a échoué" note Jean-Christophe Vié, l'auteur principal du rapport.
Le diagnostic de l'UICN se fonde sur l'observation de 45 000 espèces animales et végétales, réunies sur une "Liste rouge" qui, au fil des ans, s'est imposée comme une référence.
C'est un petit échantillon : les experts estiment qu'il existe 15 millions d'espèces, dont 1,8 million seulement ont été décrites. Mais "à chaque fois que nous menons des enquêtes plus poussées sur une espèce spécifique, la tendance globale se confirme", explique Sébastien Moncorps du comité français de l'UICN.
UN OISEAU SUR HUIT, UN MAMMIFÈRE SUR QUATRE
Sur 45 000 espèces, 16 928 sont menacées d'extinction, soit un oiseau sur huit, un mammifère sur quatre et un amphibien sur trois.
Derrière ces tendances globales, le rapport s'attarde sur le sort des espèces menacées utilisées par l'homme pour son alimentation ou pour la médecine traditionnelle. Pour conclure à une situation encore plus critique : "36 % des mammifères consommés par les hommes sont en danger, contre 21 % en moyenne", souligne Jean-Christophe Vié en pointant la menace que cela constitue pour la sécurité alimentaire.
Les auteurs du rapport ont par ailleurs essayé d'évaluer l'impact futur du changement climatique. Si la plupart des espèces de la Liste rouge sont sensibles au réchauffement, un plus grand nombre d'espèces, aujourd'hui considérées en bon état de conservation, seront, selon eux, gravement touchées par la transformation de leur environnement.
"L'étendue des espèces sensibles a de quoi faire frémir", observe M. Vié. Aujourd'hui, la destruction des habitats liée à la poussée urbaine et à l'intensification de l'agriculture, la surexploitation et la présence d'espèces invasives restent les principales causes de l'érosion de la biodiversité.
Dans ce panorama, l'UICN trouve cependant une raison d'espérer. Les actions de protection se multiplient au niveau local. En quelques années, elles ont, par exemple, permis à l'éléphant d'Afrique, au bison d'Europe, au zèbre de montagne, au cheval de Prévalsky, au rhinocéros unicorne d'Inde ou au tamarin lion noir du Brésil de sortir de la spirale du déclin.
"C'est bien, mais pour éviter la crise d'extinction, il faut aller plus loin et plus vite", conclut l'organisation.
Article paru dans l'édition du 03.07.09.