Flash crash : La finance façon Mario Kart...

Les mots ont un sens. Le 2 Octobre 2010 par Napakatbra

 

L'effet papillon, version Wall Street. Selon la SEC, un modeste courtier planqué au fin fond du Kansas peut générer un krack mondial en quelques minutes. Une vaste blague... ou l'aveu d'un système prêt à s'effondrer à tout moment ?

Flash crash - SEC

Le 6 mai dernier, la bourse de New York a perdu près de 10% (l'équivalent de 900 milliards de dollars) en quelques minutes. À peine le temps de se demander s'il fallait paniquer qu'elle s'était déjà rétablie. Ce que l'on appelle aujourd'hui le "flash crash". S'il n'y a pas eu mort d'homme, l'Oncle Sam s'est tout de même fait une belle frayeur. Pensez... le temple absolu du libéralisme américain (Wall Street) a vacillé, ébranlant les bourses mondiales dans son sillage... sans que personne ne sache pourquoi ! Avouez que c'est gênant.

La bataille des machines

La SEC (le gendarme de la bourse US) a enquêté. Elle vient de pondre son rapport. Résultat : Une seule et unique transaction d'un courtier fort peu précautionneux aurait déclenché le cataclysme. Explication. Ce jour là, le marché était en petite forme. Plusieurs mauvaises nouvelles venaient de tomber. Et Bam, c'est pile le moment qu'a choisi un fonds spéculatif pour balancer 4 milliards $ de contrats (e-mini pour les connaisseurs) sur le marché. Au début, tout s'est bien passé. Mais rapidement, la morosité ambiante a fait que les acheteurs se sont rapidement désistés. Suivis de près par les batteries d'hyper-machines exécutant des programmes de high frequency trading (capables d'exécuter plusieurs millions de transactions par seconde). Le hic, c'est que le vendeur avait aussi mandaté un ordinateur pour revendre sa camelote, et que le programme choisi n'était pas censé tenir compte du prix de vente. En une demi-heure, le Dow Jones avait perdu 10%. CQFD.

La faute à pas d'chance... selon la SEC

Le problème, c'est que le fonds de placement à l'origine de la chute s'appelle Waddell & Reed Financial, selon Reuters. Une modeste structure, dont le capital investi ne dépasse pas les 25 milliards de dollars. Une paille, au milieu d'une botte de foin. Et la transaction fautive n'aurait, selon la firme, représenté qu'1% des volumes échangés ce jour là. Pas de quoi en faire une maladie. Et au lieu de "rétablir la confiance du public" dans le système boursier américain, ce rapport devrait en réalité avoir l'effet d'une bombe atomique ! Car si ce petit fonds d'investissement est capable de faire exploser les bourses mondiales, tout seul, dans son coin, alors des centaines d'autres capital-risqueurs autrement plus gros jonglent en permanence avec un détonateur nucléaire. Pas franchement rassurant...

Et le high frequency trading, dans tout ça ?

Pour l'instant, et contre toute attente, d'ailleurs, le rapport ménage les firmes spécialisées dans le high frequency trading (HFT). Mais on ne sait pas vraiment quel a été leur rôle dans cette histoire. D'autant qu'un autre rapport, celui de l'Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM), indique "qu'après la forte baisse soudaine des indices américains, un certain nombre [d'opérateurs négociant à haute fréquence] se sont rapidement retirés du marché canadien causant une diminution spectaculaire et rapide de la liquidité disponible". Beep-beep. Le HFT serait donc à l'origine de la chute de la bourse canadienne. Difficile, dès lors, d'affirmer qu'il n'aurait eu aucune influence aux Etats-Unis, toujours en pointe dans les technologies humanistes. 

Wall Street, un casino géant

Selon Samuel Rondot, un spécialiste du HFT, le nombre d'ordres passés en bourse sur une seule journée est de 60 à 70 fois supérieur au nombre de titres échangés. En gros, les super-ordinateurs balancent des dizaines de milliards d'ordres fantômes, et ce, dans le seul but de tromper... les systèmes informatiques concurrents. Début août, d'ailleurs, et pour la première fois dans l'histoire, plus de 80% des valeurs US ont évolué en fonction de critères purement spéculatifs, en déconnexion totale des fondamentaux spécifiques aux entreprises ! Ajoutez à cela les dizaines de bourses privées, y compris les dark pools totalement anonymes et opaques, qui échappent à toute législation et qui représenteraient aujourd'hui les deux tiers des échanges boursiers américains... et vous obtiendrez le parfait portrait d'un capitalisme enfin moralisé.

On n'arrête pas le progrès, mais on peut le faire boguer...


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Dernière mise à jour de cette page le 21/11/2010

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