Développement Durable. Le 9 Septembre 2010 par Albane Wurtz
Pour préparer sa future défense, face aux poursuites engagées, le groupe BP a pondu un rapport de 193 pages censé évaluer les responsabilités. Au royaume de BP, BP est bien sûr roi ! Insistant sur un « partage des responsabilités », le groupe pétrolier tape surtout sur les deux autres compagnies, le leader du forage en haute mer, le suisse Transocean et le cimentier américain Halliburton. Accusés, levez-vous !
« Au soir du 20 avril 2010, une opération de contrôle du puits a provoqué la fuite d’hydrocarbures du puits Macondo vers la plateforme de Transocean, Deepwater Horizon, provoquant plusieurs explosions et l’incendie de la plateforme ». L’une des toutes premières phrases du rapport fleuve de BP sur les circonstances de l’explosion ayant causé la pire marée noire de l’histoire des Etats-Unis donne le ton. Pour Transocean, point de salut ! Pour BP, point de faute ! Craignant les « vagues scélérates » induites par les poursuites engagées, BP se blinde.
« Une cause unique n’est pas à l’origine de la tragédie du puits Macondo. C’est plutôt une série d’erreurs impliquant plusieurs parties qui a conduit à l’explosion et à l’incendie ayant provoqué la mort de 11 personnes et une pollution majeure ». Ici encore, point de BP ! Et la série d’erreurs dont il est question ne relève pas non plus de flagrantes erreurs du pétrolier. Par contre, ses sous-traitants, Transocean, le propriétaire de la plateforme et Halliburton, un prestataire de services pétroliers, en prennent pour leur grade !
Un enchaînement d’erreurs… des sous-traitants !
Selon Mark Bly, le directeur des opérations et de la sécurité chez BP qui a mené l’élaboration du rapport, huit fautes majeures ont conduit à la catastrophe. D’abord, le ciment (comprendre Halliburton !), qui entourait le puits, « a échoué à contenir les hydrocarbures à l’intérieur du gisement ». S’ensuivirent les défaillances d’autres structures qui ont également échoué à contenir la fuite. Le troisième point énonce enfin la responsabilité de BP. Mais pas seulement. Les résultats des tests de pression, censés avertir du danger, « ont été incorrectement interprétés par BP et Transocean ». Transocean toujours, à qui il a fallu « une quarantaine de minutes pour reconnaître et réagir à la remontée d’hydrocarbures dans le puits ». Le flux ainsi évacué a ensuite été dirigé vers un « séparateur » au lieu d’être rejeté à l’extérieur. Quelques hydrocarbures ont toutefois atteint la plateforme et du gaz a même atterri dans les salles des machines. Enfin, la valve de sécurité, qui aurait dû s’activer, à échoué à contenir le flux qui s’échappait du puits.
Des dépenses maîtrisées au dépend de la sécurité ?
Ne s’impliquant donc pas de manière explicite, BP n’a en revanche pas lésiné sur les moyens pour « charger » ses deux sous-traitants. Le suisse Transocean a immédiatement réagi en indiquant que BP dissimulait certains « éléments cruciaux qui ont conduit à l’accident de Macondo : la conception fatalement défectueuse de BP ». Ce que confirme Henry Waxman, un représentant démocrate membre des commissions d’enquête parlementaires, évoquant le choix de BP de privilégier un format de puits moins sûr mais lui permettant d’économiser 7 à 10 millions de dollars. Réponse de BP : « les deux options constituaient une base de conception solide ».
Reste maintenant à BP, l’une des victimes de l’explosion, à rassembler les milliards de dollars nécessaires pour prouver… sa bonne foi ! Pour l’heure, le pétrolier en a déjà dépensé 8 milliards et ne compte pas s’arrêter là. Selon le Sunday Times, il aurait même envisagé de céder 40 milliards de dollars d’actifs et devrait également vendre les 26 % qu’il possède dans le plus grand gisement pétrolier américain de Prudhoe Bay en Alaska. Sans compter les actifs internationaux dont il souhaite se débarrasser pour la modique somme de 5 à 10 milliards.
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