Owni. 5 mars 2012 par Jean-Marc Manach
Demain, après plusieurs mois de débats, l'Assemblée nationale votera le texte créant "Le Fichier des gens honnêtes". Un fichier officiellement destiné à lutter contre l'usurpation d'identité... Mais qui, dans les faits, autorisera de ficher l'ensemble de la population française. Retour, en dix questions, sur une inexorable dérive sécuritaire.
Au XIXe siècle, lors de la conquête de l’Ouest, des ouvriers Chinois, venus construire les lignes de chemin de fer, utilisaient de l’”huile de serpent” (“Snake oil“, en VO) comme remède “naturel” aux douleurs articulaires. Plusieurs escrocs s’emparèrent alors du phénomène, et commercialisèrent de multiples “huiles de serpent“, toutes plus placebo les unes que les autres, en faisant croire qu’elles accompliraient des miracles, et guériraient tous les maux.
Le fichier des “honnêtes gens“, créé pour mettre un terme aux usurpations d’identité, et qui sera adopté ce mardi 6 mars 2012 à l’Assemblée, en sixième lecture (et après 8 rapports parlementaires), s’apparente à une “huile de serpent“, à une “poudre de perlimpinpin“. Aux effets secondaires dévastateur. Pour la première fois depuis le gouvernement de Vichy, il s’agit de ficher l’ensemble de la population française, 60 millions d’”honnêtes gens“, au prétexte de mieux les protéger. Démonstration, en 10 questions qui, étrangement, n’ont jamais été, ou quasiment, débattues au Parlement.
Les défenseurs de la proposition de loi, ainsi qu’un certain nombre de médias, ont avancé, à tort, que l’appellation “Fichier des gens honnêtes” émanait d’opposants à ce projet. Il n’en est rien : c’est François Pillet, rapporteur (apparenté UMP) de la proposition de loi au Sénat qui, le premier, l’a utilisée, le 31 mai 2011, avant de la qualifier de “bombe à retardement pour les libertés publiques“. Le PS a ainsi rappelé que l’on n’avait jamais vu un tel projet de fichier depuis Vichy, et son “fichier général de la population, en 1940“, qui fut d’ailleurs détruit à la Libération.
L’”usurpation d’identité” est un terme générique qualifiant tout autant les faux et usages de faux (papiers, diplômes, CV, profils Facebook ou plaques d’immatriculation, etc.), les fraudes aux allocations sociales ou à la carte bancaire, les titres de transport utilisés à plusieurs ou encore le fait de donner une fausse adresse aux contrôleurs…
Prétendre que le fichier des “honnêtes gens” mettra un terme à l’usurpation d’identité est tout aussi mensonger que d’expliquer que l’”huile de serpent” permet de guérir de la peste ou du choléra.
Le fichier des “gens honnêtes” ne permettra pas vraiment d’empêcher les faux et usages de faux, la fraude aux transports publics non plus que les faux mails ou profils Facebook. En revanche, il permettra aux services de police judiciaire d’accéder aux empreintes digitales de ceux qui y sont recensés dans le cadre d’enquêtes sur des infractions dont le lien avec l’usurpation d’identité est pour le moins “ténu, voire inexistant“.
Selon François Pillet (UMP), rapporteur de la proposition de loi au Sénat, et le député (PS) Serge Blisko, de nombreuses autres poursuites judiciaires autoriseront la police à plonger allègrement dans les données de ce fichier :
- délit de révélation de l’identité d’un agent des services spécialisés de renseignement,
- faux en écritures publiques, même lorsque celles-ci ne portent pas sur l’identité d’une personne,
- escroquerie, même lorsque l’escroc ne se dissimule pas sous une fausse identité,
- franchissement illicite d’un portillon dans le métro ou déplacement sans titre de transport
Or, ce que craint François Pillet, tout comme les députés et sénateurs de l’opposition, ainsi que la présidente de la CNIL, qui s’est dit “inquiète“, c’est que “le dispositif proposé (…) ouvre la voie à d’autres empiètements, à l’avenir, afin d’étendre peu à peu le périmètre de l’utilisation du fichier central biométrique de la population française“, comme ce fut le cas pour le FNAEG, créé pour ficher les empreintes génétiques des criminels sexuels et élargi, depuis, aux simples suspects de la quasi-totalité des crimes et délits. Le FNAEG répertorie ainsi aujourd’hui les empreintes génétiques de près de 2 millions d’individus, dont 67% n’ont jamais été condamnés.
L’objectif affiché du fichier des “honnêtes gens” est d’empêcher quelqu’un de se procurer une carte d’identité au nom de quelqu’un d’autre. Mais le postulat de départ de ce fichier est que les “gens malhonnêtes” attendront patiemment que les 60 millions de “gens honnêtes” aient préalablement confié leurs états civils, empreintes digitales et faciales, avant que de tenter d’usurper leur identité… ce dont on peut légitimement douter.
Dans les faits, le fichier des “gens honnêtes” n’empêchera donc pas une personne malintentionnée de, par exemple, utiliser un faux passeport, un faux document pour usurper votre identité auprès d’administrations publiques ou d’entreprises privées, comme Nicolas Caproni, consultant en cybercriminalité et sécurité des systèmes d’information, à qui cette mésaventure vient d’arriver, s’en est expliqué.
Seuls les officiers de police judiciaire, enquêtant sur des soupçons d’usurpation d’identité, seront habilités à vérifier l’état civil et les empreintes digitales des personnes inscrites au fichier des “gens honnêtes“. Les gendarmes et policiers, employés d’administration ou d’entreprises privées, qui contrôleront nos papiers sans avoir accès au fichier ne pourront donc pas savoir si le titulaire de la carte d’identité qui leur sera présentée est son détenteur légitime, ou non.
Cette problématique n’a rien d’illusoire, ou d’hypothétique : Le Parisien révélait récemment que plus de 10% des passeports biométriques seraient des faux :
Sur les 7 millions de passeports biométriques en circulation, 500 000 (selon certains criminologues) à 1 million (de source officieuse policière) seraient indûment obtenus.
Ces passeports biométriques avaient pourtant, précisément, été sécurisés en s’adossant à un fichier des empreintes digitales et photographies numérisées de leurs détenteurs. Ironie de l’histoire, ce fichier des titres électroniques sécurisés TES est précisément celui qui sera utilisé pour ficher les “gens honnêtes“…
Les défenseurs de la proposition de loi sur la protection de l’identité parlent de 210 000 usurpations d’identité, par an. Ils oublient de préciser qu’il s’agit d’une estimation issue d’un sondage financé par une entreprise commercialisant des broyeurs de documents, et qui avait donc intérêt à exagérer le nombre d’usurpations d’identité.
Comme l’a résumé François Pillet, rapporteur (UMP) de la proposition de loi, ces données “n’ont pas été scientifiquement établies, le chiffre de 210 000 cas (ayant) été obtenu en suivant une méthode unanimement critiquée (et) d’une fiabilité douteuse“.
L’observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) estime de son côté que le nombre de “faux documents d’identité” est passé de 8361 en 2005 à 6342 en 2010, soit une baisse de 24% en 5 ans, chiffres que se sont bien gardés de mentionner Claude Guéant et les partisans du fichier des “honnêtes gens” au Parlement :
Dans le même document, on apprend que la Police de l’Air et des frontières, a comptabilisé, en 2010, “2 670 documents frauduleux français (dont) 1 142 titres de séjour, 216 visas, 651 cartes d’identité1, 510 passeports et 151 permis de conduire“.
Or, Michel Bergue, directeur de projet sur la lutte contre la fraude documentaire et à l’identité au ministère de l’intérieur, auditionné à l’Assemblée, avait de son côté expliqué qu’”environ 80 % des fraudes détectées sont le fait de ressortissants étrangers souhaitant se maintenir irrégulièrement sur notre territoire“. Le Parlement s’apprête donc à voter le fichage de 60 millions de “gens honnêtes” alors que le ministère de l’Intérieur ne sait même pas combien l’on détecte de fausses cartes d’identité, par an, mais que l’on peut néanmoins estimer qu’il ne dépasse probablement pas le millier.
Ce même document contient un autre chiffre très intéressant : on y apprend en effet que si le nombre de faux documents administratifs est passé de 8361 à 6342, en 5 ans, “100 757 personnes ont été signalées pour l’utilisation d’au moins deux états civils différents” en 2010, un chiffre en augmentation de 109,9% en 5 ans :
L’ONDRP tient cela dit à préciser que ce chiffre, “calculé à partir du fichier automatique des empreintes digitales” (FAED) et qui correspond au nombre de personnes qui, “placés en garde à vue pour une affaire de crimes ou délits“, auraient déclaré “au moins deux identités“, est probablement surestimé, dans la mesure où il additionne “les usurpations avérées de celles résultant de fautes d’orthographe ou d’erreurs dans l’enregistrement phonétique des identités“.
En attendant, si on peine à comprendre l’intérêt de vouloir enregistrer les empreintes digitales de 60 millions de “gens honnêtes” afin de lutter contre moins d’un millier de fausses cartes d’identité, on comprend par contre l’intérêt de pouvoir exploiter untel fichier centralisé des empreintes digitales afin d’identifier ceux qui déclarent une fausse identité aux policiers, mais qui ne figureraient pas encore dans le FAED.
En février 2011, ce fichier contenait les empreintes digitales de 3,6 millions d’individus “mis en cause“. Le fichier TES, lui, a d’ores et déjà fiché les empreintes digitales, et photos numérisées, de 7 millions de Français. Aucun parlementaire n’a jamais abordé la question de savoir si les empreintes digitales de ceux qui, parce qu’ils ont demandé un passeport biométrique, y sont déjà fichés, pourront être exploitées de façon policière.
Au-delà des services de police judiciaire, les grands gagnants sont les industriels français des cartes à puce, papiers d’identité sécurisés, de la biométrie et des empreintes digitales, comme l’ont d’ailleurs eux-même reconnu, au Parlement, l’auteur de la proposition de loi, tout comme ses deux rapporteurs :
Les principales entreprises mondiales du secteur sont françaises, dont 3 des 5 leaders mondiaux des technologies de la carte à puce, emploient plusieurs dizaines de milliers de salariés très qualifiés et réalisent 90 % de leur chiffre d’affaires à l’exportation.
Dans ce contexte, le choix de la France d’une carte nationale d’identité électronique serait un signal fort en faveur de notre industrie.
Oberthur, Morpho et Gemalto fournissent 70% des programmes nationaux dans le monde avec un capital de plus de 150 références.
Les entreprises françaises sont en pointe mais elles ne vendent rien en France, ce qui les pénalise à l’exportation par rapport aux concurrents américains.
Le sujet engage aussi des enjeux économiques, industriels : la sécurisation des échanges électroniques est un marché (…) Les entreprises françaises, en pointe sur ce domaine, veulent investir le marché français.
De fait, pas moins de 14 représentants du Gixel, le syndicat des industriels de l’électronique, ont été auditionnés par le rapporteur de la proposition de loi au Sénat, contre seulement 2 représentants du ministère de la justice et 6 de l’Intérieur, 2 de la CNIL et 2 autres du Comité consultatif national d’éthique, et 1 représentant de la Ligue des droits de l’homme.
Le Gixel s’était précédemment illustré en proposant, en 2004, de déployer caméras de vidéosurveillance et bornes biométriques dès l’école maternelle, afin d’y habituer les enfants dès leur plus jeune âge. Partant du constat que ces technologies ont un petit côté “Big Brother“, ils espéraient ainsi gagner les coeurs, et vaincre les peurs, des citoyens, et donc doper leur chiffre d’affaires.
De fait, en 2011, pas moins de 544 établissements scolaires français utilisent des dispositifs de reconnaissance biométrique pour contrôler l’accès de leurs élèves à la cantine. Le Gixel plaide depuis des années pour le déploiement de cette carte d’identité électronique, mais a d’autres pistes de développements industriels en perspective :
- contrôle d’accès en mouvement, coopératif ou non, avec reconnaissance faciale ou de l’iris ;
- reconnaissance à la volée, faciale ou de l’iris, avec capacité à identifier et localiser ;et, en terme d’amélioration de l’efficacité de la vidéo-protection :
- la caractérisation sémantique d’individus pour la recherche sur signalement ;
- la détection d’événements anormaux ;
- le développement de l’exploitation de caméras mobiles, embarquées ;
- la vision nocturne, la prise en compte des conditions environnementales difficiles.
En avril 2011, le ministre de l’Intérieur des Pays-Bas décidait d’effacer les empreintes digitales stockées de ses ressortissants après qu’une étude ait révélé des taux d’erreurs de 20 à 25% :
Il est devenu clair que l’inclusion des empreintes digitales dans les documents de voyage est qualitativement inadéquat.
A contrario, les autorités indiennes, qui ont notamment confié à la société française Morpho, n°1 mondial des empreintes digitales, le soin de délivrer des papiers d’identité biométriques à plus de 1,2 milliards de citoyens, viennent fièrement d’annoncer qu’elles sont en mesure d’identifier, de façon unique, 99,86% de leurs concitoyens (voir notre enquête : Vérités à biométrie variable).
Pour parvenir à un taux d’erreur acceptable, limiter le nombre de “faux positifs” (personnes identifiées, à tort) et de “faux négatifs” (personnes non identifiées à tort), et attribuer un identifiant unique à ces 1,2 milliards d’Indiens, elles n’ont eu d’autre choix que de recueillir les empreintes digitales des 10 doigts de leur main, mais également photographier leurs deux iris. Aucun parlementaire n’a posé la question de savoir comment, avec deux empreintes digitales seulement, il sera possible de parvenir à un taux d’erreurs acceptable et donc d’identifier, de manière unique, 45 à 60 millions de Français.
La question est d’autant plus brûlante qu’on a d’ores et déjà répertorié plusieurs innocents accusés, à tort, par des “experts” de la police scientifique et technique, d’avoir laissé leurs empreintes digitales sur des scène de crime où ils n’avaient jamais mis les pieds ni, a fortiori, les doigts. La reconnaissance biométrique n’est pas quelque chose de “scientifique“, mais de “statistique“, et ça change tout. Non seulement parce qu’elle ne permet pas de “prouver“, mais seulement de “présumer“, mais également parce que les erreurs (humaines, de calcul, de prélèvement ou de comparaison) et biais (méthodologiques ou statistiques) sont d’autant plus difficiles à déceler et combattre que, pour la majeure partie des gens, les “experts” ont forcément raison, puisque leurs preuves sont “scientifiques“…
On tourne donc en rond. Rajoutez-y le fait qu’il est également possible de falsifier des analyses, de fabriquer des “preuves” ou encore de se doter de “vraies-fausses” empreintes digitales à partir de pâte à modeler, de gélatine, de silicone, de latex ou encore de colle à bois, et la boucle est bouclée. En clair : un quidam mal intentionné pourra ainsi venir s’enregistrer dans le fichier des “gens honnêtes” sous le nom de Nicolas Sarkozy, mais avec les empreintes digitales d’Angela Merkel, François Hollande ou toute autre personne dont il aurait prélevé les empreintes digitales, afin de pouvoir les usurper.
Aussi étonnant que cela puisse paraître, en temps de crise et de réduction des dépenses et des déficits publics, et alors que cette proposition de loi a fait l’objet de pas moins de 8 rapports parlementaires, et qu’elle a déjà été débattue 5 fois à l’Assemblée, et 6 fois au Sénat, aucune estimation budgétaire n’a jamais été avancée. Aucun parlementaire n’a jamais posé la question de savoir combien cela va coûter à la collectivité, ni combien cela reviendra aux citoyens qui voudront se doter de cette nouvelle carte d’identité. Étonnant, non ?
Les Etats-Unis n’ont pas de carte d’identité, et y sont fermement opposés. Au Royaume-Uni, le ministre de l’immigration a détruit, en 2010, les disques durs contenant les empreintes digitales de ceux qui avaient accepté de servir de cobaye au projet, désormais avorté, de carte d’identité. Dans ces deux pays, ce sont les partis politiques de droite qui sont le plus farouchement opposés à l’idée même de carte d’identité, perçue comme une main-mise étatique, et donc une atteinte aux libertés des citoyens.
Les règlements européens obligent certes les pays signataires des accords de Schengen à inscrire les empreintes digitales de leurs concitoyens dans leurs passeports… sauf les Britanniques, les Danois et les Irlandais, qui ont réussi à obtenir des dérogations.
En tout état de cause, aucun règlement n’oblige les Etats membres à créer une base de données centralisée des empreintes digitales et photographies numérisées de leurs concitoyens, cette possibilité ayant été laissée à la libre interprétation des pays signataires. De fait, plusieurs pays ont ainsi préféré opter pour des bases de données décentralisées, ou se sont contenté de stocker les empreintes dans la puce contenue sur les papiers d’identité : sur les 13 pays européens ayant décidé de doter leurs concitoyens de cartes d’identité, seuls 3 (Espagne, Lithuanie et Portugal) auraient opté pour une base de données centralisée.
La loi informatique et libertés est claire : un fichier ne peut être détourné de sa finalité première, et il est donc fort possible que la loi soit, à terme, retoquée par le Conseil constitutionnel (si tant est qu’un nombre suffisant de sénateurs et/ou députés intentent un recours au Conseil constitutionnel), le Conseil d’Etat, ou encore par la Cour européenne des droits de l’homme, afin d’interdire l’exploitation policière de ce fichier administratif. Les partisans de cette loi répètent à l’envi qu’il s’agit en effet d’un fichier “administratif“, mais son intitulé, sur le site de l’Assemblée, sous l’en-tête “Police et sécurité“, est pourtant on ne peut plus clair :
Last but not least, et ce n’est pas le moindre paradoxe de ce fichier des “gens honnêtes” : s’il est difficile de mener une vie sociale sans carte d’identité ni passeport, la carte d’identité (tout comme le passeport) n’est nullement obligatoire… et ceux qui en ont déjà une pourront continuer à s’en servir, “même lorsqu’elle est périmée, sous réserve dans ce cas que la photo soit ressemblante“.
En attendant, Claude Guéant n’en aura pas moins ouvert la boîte de Pandore du fichage biométrique généralisé de la population.
Lors des précédents votes, la proposition de loi avait été adoptée par moins d’une quinzaine de députés ou sénateurs. Le parti socialiste a obtenu que la proposition de loi fasse l’objet d’un “vote solennel“. Cela ne changera probablement pas grand chose, mais c’est tout un symbole : ce mardi 6 mars, c’est le dernier jour de la session parlementaire. Il était probablement urgent de voter le fichage des “honnêtes gens“.
Voir aussi l’intégralité de nos articles sur ce fichier des “gens honnêtes”.
Aucun commentaire pour l'instant, soyez le premier à laisser un commentaire.