Source : Le Lot en Action de mars 2015 (n°88), par Bluboux, mis en ligne le 31 mars 2015
La Cour des comptes dénonce la gestion des agences de l'eau : en charge de faire appliquer le principe pollueurs-payeurs, ces dernières font payer les consommateurs en lieu et place des agriculteurs...
Subventions très généreuses, absence de contrôle, mansuétude envers les pollueurs, conflits d'intérêts… La Cour des comptes a étrillé les six agences chargées de la politique de l'eau en France dans son rapport annuel, rendu public le 11 janvier dernier. Ces agences collectent nos « redevances eau » et sont en charge de les redistribuer pour la préservation de la ressource et la protection des milieux aquatiques. Et ça représente beaucoup d'argent. Sur la période 2007-2012 elles devaient redistribuer 13,6 milliards d'euros pour améliorer les réseaux de collecte, financer des unités de traitement des eaux usées et préserver des zones humides (en oubliant un peu Sivens et Notre-Dame-des-Landes…). C'est en fait 14,9 milliards qui ont été dépensés, soit plus que le budget alloué (qui est en fait payé par les consommateurs à hauteur de 87%).
Dans le rapport, les juges montrent à quel point le fameux principe du pollueur-payeur, censé porter la politique nationale de l'eau, tend à devenir un mythe. L'application de ce principe « a reculé » ces dernières années, concluent-ils, et « ceux dont l'activité est à l'origine des pollutions graves ne sont pas sanctionnés en proportion des dégâts qu'ils provoquent ».
On peut même parler de pollueurs-payés. Ainsi, dans le bassin Rhin-Meuse, marqué par diverses pollutions industrielles, la contribution des entreprises de ce secteur n'était plus que de 11 % du total en 2013, contre 22 % six ans plus tôt. Dans le bassin rhodanien, où le prélèvement d'eau est le plus disputé avec celui d'Adour-Garonne, la redevance payée par les agriculteurs irrigants est « très inférieure » à la moyenne, pointe le rapport. Résultat : l'irrigation ne paie dans cette grande région que 3 % du montant total des redevances alors qu'elle capte 70 % des eaux prélevées en surface. Et, à la différence des autres secteurs, l'agriculture ne rend pas à la nature ce qu'elle a pompé après usage. Quant à l'agence de la Seine-Normandie, elle avait décidé de faire peser 92 % de ses recettes sur les seuls usagers. Le ministère de l'écologie, tutelle des agences, est même intervenu pour faire redresser légèrement la barre depuis.
Rappelons qu'en matière de pollutions diffuses d'origine agricole la France est sous la menace d'une amende (qui risque d'être colossale) de la part de la Cour de justice de l'Union européenne. On se demande ce que fait notre député Jean Launay, président du Comité National de l'eau, qui a dans ses attributions la « construction du lien entre la protection des milieux naturels et la gestion de la ressource eau pour l’alimentation en eau potable et les activités économiques ». Ajoutons également que Jean Launay est vice-président du bassin Adour-Garonne...
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