Blogs de Rue89. 11 décembre 2011 par Jean-Pirre Filiu
Zebda est de retour, et en très grande forme, après une éclipse de sept ans. Ils viennent d'enchaîner deux mois de concerts, de Cahors à Brest en passant par Strasbourg et (samedi prochain) Montpellier.
Ils étaient jusqu'à samedi à la Goutte-d'Or (XVIIIe arrondissement de Paris), au centre Fleury, pour trois jours de POS (Plan d'occupation du sol) alternant débats citoyens et concerts sur-vitaminés.
Zebda, « Tomber la chemise ». Salle Fleury, la Goutte-d'Or
France Inter a pris l'heureuse initiative de retransmettre les deux heures de spectacle de samedi en direct, distillant sur ses ondes un peu de cette énergie motivée.
Les concerts avant le disque
Il ne s'agit là que du « premier tour » de Zebda reconstitué, en attendant le « Second tour », leur nouveau disque, qui sortira le mois prochain. Car le groupe, si généreux sur scène, renverse la logique promotionnelle qui voudrait qu'une série de « dates » assure le lancement d'un disque. Non, ces gaillards ne font jamais rien comme les autres, c'est avec le public qu'ils étrennent les morceaux que l'on découvrira ensuite dans leur version studio.
Ainsi vont « Autour de l'église » (Saint-Sernin), « Le Théorème » (du châle/du voile) ou « La Correction », toutes variations festives sur les thèmes de la solidarité et de la laïcité, permanences de l'engagement de Zebda. « Ici là-bas » fait parler les harragas, prêts à tout pour passer la Méditerranée :
« On vous rend le pétrole, mais rendez-nous la vie. »
Après tout, la révolution arabe a bien éclaté dans la Tunisie qui n'avait pas une goutte de pétrole.
Le public de Barbès connaît par cœur les paroles de « Mon père m'a dit » ou « Je crois que ça va pas être possible ». Zebda choisit de ne pas choisir et offre à la fois « Tomber la chemise » et « Motivés », les deux morceaux emblématiques de son succès commercial comme de son écho revendicatif. Ariane Ascaride ou Idir, discrets dans l'ombre de la salle, n'en perdent pas une rime.
Sept années de pose
Durant ces années de « prise d'oxygène », Zebda a gardé son studio communautaire de Toulouse en partage. Magyd Cherfi a écrit deux livres et, épaulé par le bassiste Joël Saurin, il a réalisé deux albums solos.
Les frères Moustapha et Hakim Amokrane, accompagnés de Rémi Sanchez aux claviers (entre autres), se sont lancés dans l'aventure de « Mouss et Hakim », puis d'« Origines Contrôlées », formidable hommage aux chansons de l'immigration algérienne, lui-même adossé à un festival annuel dans les quartiers de Toulouse. Et 2010 les a vus se retrouver tous les cinq, pour mitonner ensemble ce premier, puis ce second tour.
Je suis pour ma part tombé dans Zebda il y a deux décennies, à la sortie de leur Arabadub sur pochette d'intifada. Je les ai ensuite accueillis en Syrie, en 1998, pour des concerts d'anthologie à Damas comme à Alep. La mosquée des Omeyyades vibre encore des riffs rageurs qui scandaient alors « D'Eve à Lise ». Joël Saurin à la basse est aujourd'hui entouré d'une paire en or de guitaristes, Julien Costa et Yannick, dit « Chaton » (il fallait bien un Breton dans cette bande de Toulousains).
Après le premier tour, il y aura le second, et à chacun de fixer les échéances de ses espérances. Zebda est de retour, plus motivé-e-s que jamais.
« Je fais le mixe qui dégoûte pas du vote, je le fais cool pour qu'on s'y casse pas les côtes. »
Cette chanson s'appelle toujours « On est chez nous ». Qu'on se le dise.
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