Le Lot en Action mag n°42. 21 octobre 2011 par Michel Guillaumin
Le 18 mars 1871, « la classe ouvrière se lance à l’assaut du ciel ! »
Héritière de 1789 ainsi que de l’insurrection populaire de 1848, la Commune en reprendra toutes les idées. En 72 jours, contre la trahison du pouvoir bourgeois de l’époque dans la guerre franco-prussienne, la Commune fera plus pour le peuple que les « possédants » au pouvoir en 100 ans.
Petit rappel historique.
Juillet 1870, Napoléon III déclare la guerre à la Prusse… et capitule le 4 septembre 1870 (Sedan) et courageusement fuit en Angleterre. Il s’en suit une journée d’émeute parisienne qui débouche sur la proclamation de la IIIème République. Un gouvernement de Défense Nationale s’installe à l’Hôtel de Ville de Paris et poursuit la guerre contre les Prussiens dont les troupes occupent le nord de pays. Paris est assiégé, le peuple a faim et froid, mais il résiste…et fait peur au gouvernement de Défense Nationale qui trahira le peuple en signant l’armistice le 28 janvier 1870 (l’Alsace et la Lorraine deviennent Prussiennes). L’Assemblée Nationale élue dans l’urgence le 8 février pour ratifier l’armistice, est majoritairement royaliste et bonapartiste, alors que les élus de Paris sont pour la plupart républicains et comme le peuple parisien, ne se considèrent pas comme vaincus.
Le 10 mars 1871, l’Assemblée Nationale se réfugie à Versailles, nomme Thiers chef de l’exécutif. Le pouvoir redoute la révolte populaire (ce n’est pas nouveau) et, le 18 mars, ordonne à l’armée de s’emparer des canons de la Garde nationale qui protège Paris (canons payés par souscription populaire). L’armée, après discussion avec la Garde nationale et la population, refuse de tirer sur la foule, met « crosse en l’air » et fraternise avec le peuple. Thiers, avec les habitants des beaux quartiers de l’ouest parisien, fuit Paris pour se réfugier à Versailles (ceux que l’on nommera « les versaillais », bouchers de la Commune).
Le 26 mars, élections des 92 membres du Conseil de la Commune majoritairement représentatif des classes populaires (30% d’ouvriers, artisans et petite bourgeoisie parisienne). Les courants politiques socialistes, républicains et anarchistes y sont représentés. Bien que constitués en majorité et minorité, ils voteront ensemble les mesures sociales et feront front commun dès l’entrée des troupes versaillaises dans Paris.
La vie politique est extrêmement riche, plus de 70 journaux sont créés, la population débat, critique, propose. Le peuple s’occupe directement, politiquement de ses affaires.
Au plan symbolique d’abord (des décisions politiques qui ne coûtent rien mais sont fondatrices. « Un signal fort » dirait-on aujourd’hui) : adoption du drapeau rouge et du calendrier révolutionnaire, destruction de la colonne Vendôme (symbole de la barbarie et du militarisme, négation de l’internationalisme), confiscation des biens de Thiers…
Au plan concret ensuite, la solidarité s’organise (pensions versées aux blessés, veuves et orphelins – organisation du ravitaillement – arrêt des poursuites pour impayés). Mais surtout la Commune met en œuvre des décisions politiques qui feront date et inspireront les révolutions ultérieures de par le monde.
DEMOCRATIE DIRECTE : les membres de l’assemblée sont élus et révocables, leurs décisions discutées, c’est le gouvernement du peuple par le peuple pour le peuple. Dans les entreprises, un conseil de direction est élu tous les 15 jours par atelier et un ouvrier chargé de transmettre les réclamations. Voilà les prémisses de l’autogestion posés…
DROIT DU TRAVAIL : réduction du temps de travail (déjà.. et toujours d’actualité en 2011), interdiction du travail de nuit (dans les boulangeries), interdiction des amendes et retenues sur salaire, création de bureau d’embauche contre le chômage (et oui ça vient de la Commune).
DROIT DES FEMMES : Louise MICHEL en est la figure emblématique. Nathalie LEMEL et Elisabeth DILITRIEFF (révolutionnaire russe), créée l’Union des Femmes (première organisation féministe de masse) qui pose et impose le principe « à travail égal, salaire égal ! » (On voit, 140 ans après ce qu’il en est…). Lutte contre la prostitution, droit de vote des femmes (qui ne sera effectif qu’en…1946). Création d’un enseignement professionnel uniformisé mixte (Edouard VAILLANT), salaires égaux pour les hommes et les femmes dans l’enseignement, etc.
LAICITE : interdiction de l’enseignement confessionnel, suppression des signes religieux chrétiens dans les salles de classe. L’école est laïque, gratuite et obligatoire.
EDUCATION ET CULTURE POPULAIRE : mise en place de cours publics traitant de sciences, littérature, arts etc. Réouverture des musées, théâtres, bibliothèques, organisation de concerts. La libre expression de l’art, dégagé de toute tutelle gouvernementale et de tous privilèges est revendiquée par la Fédérations des artistes (Eugène POTTIER, COURBET, MANET, DAUMIER, DALOU…).
LIBERTE DE LA PRESSE : elle est réaffirmée le 19 mars par le Comité de la Garde nationale (même pour les journaux favorables aux intérêts de l’armée ennemie). Par contre le « gouvernement versaillais » d’Adolphe THIERS interdira la diffusion de la presse « Communarde » en province.
LOGEMENT : d’octobre 70 à avril 71,«remise» des loyers, interdiction des expulsions locatives, réquisition des logements vides (revendications toujours d’actualité, portées entre autre par le DAL –Droit au logement).
DECISIONS POLITIQUES et LOIS de JUSTICE SOCIALE : Abolition de la peine de mort (effective en 1981), droit au divorce, droit à l’union libre, justice gratuite. L’armée est remplacée par la Garde Nationale, c'est-à-dire le peuple en armes dont les gradés sont élus. Des étrangers sont élus à la Commune qui décide que « toute cité a le droit de donner le titre de citoyen aux étrangers qui la servent »… !
VOILA l’ŒUVRE DE LA COMMUNE ! On comprend mieux pourquoi la répression fut si féroce, elle a été à la mesure de la peur et de la haine de classe des possédants de l’époque. Cette peur du peuple en marche est toujours le cauchemar de nos dirigeants.
Ce que l’on a appelé « la semaine sanglante » (21 mai au 28 mai 1871) sera marquée par des exécutions sommaires (entre 10 000 et 30 000 hommes femmes et enfants furent massacrés sur une population qui compte environ 900 000 habitants dont 500 000 ouvriers). Les « versaillais » condamneront les survivants aux travaux forcés et à la déportation (Louise MICHEL fut du nombre). Ceux qui ont échappé à la répression s’exileront notamment aux Etats-Unis. L’amnistie n’interviendra qu’en 1880. D’autres Communes furent proclamées mais très vite réprimées, empêchant une généralisation de ce processus démocratique (Marseille, Toulouse, Lyon, Saint-Etienne, Narbonne, le Creusot, Limoges).
En 2011, 140 ans après, nous disons que les idées et valeurs portées par les Communards sont toujours d’actualité. A nous de les faire vivre dans nos luttes actuelles. « Non Nicolas, la commune n’est pas morte » comme l’écrivait Eugène POTTIER en 1871. Plus que jamais elle demeure d’actualité dans ce monde inhumain, inégalitaire, où la richesse produite par l’immense majorité est appropriée (spoliée) par une petite minorité.
Michel Guillaumin, LIBRAITHEQUE « Le Droit à la Paresse » Cahors,
(Résumé d’un article paru dans HL-n°1-mai 2011)
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1. 11/10/2014
L'engagement politique de cet article détruit toute objectivité historique. Vous manipulez l'histoire pour servir vos idées, et cela ne réveille pas les consciences, ça les trompe.
Vous idéalisez et simplifiez cette période. Si la Commune ne s'est pas étendue en France, c'est d'abord parce que le peuple ne partageait pas ses idées, la Commune fut un mouvement impulsé par une extrême minorité.
Le peuple français était alors encore profondément religieux, sexiste (d'ailleurs le terme est anachronique puisque la situation n'était même pas remise en question), et très minoritairement éveillé à la question sociale; il ne pouvait donc pas partager les idées communardes.
Ces éléments n'enlèvent rien à l'horreur de la semaine sanglante, à la singularité du phénomène et au progressisme des idées, mais il faut bien rappeler que c'est un mouvement qui est né contre la volonté du peuple puisqu'il s'oppose au gouvernement élu par le peuple. Louer la Commune c'est considérer que le peuple n'est pas capable de faire les bons choix et que la minorité indignée doit prévaloir sur la majorité.
J'ai du mal à accepter ce principe, le peuple était épuisé par la guerre, il a voté pour les monarchistes car eux-seuls voulaient en finir, les républicains et les radicaux ont perdu parce qu'ils n'ont pas su écouter les Français. A partir de là, quelle légitimité avaient-ils à reprendre le pouvoir par la force ?
Je partage les idées de ce site mais ne peut accepter cette manipulation de l'information.
Aure.
2. 30/05/2014
3. 27/12/2011
140 années sont passées, mais c'est une utopie qui peut encore alimenter nos prochaines échéances politiques et sociétales.
Merci au "lieu commun" de St-Céré qui nous a proposé une expo, un film et "le cabaret communard" à l'Usine pour nous rappeler cet effervescence et imagination et ses engagements pour "changer" la vie du peuple et créer ces valeurs indispensables à un humanisme commun.
Le Lot en Action, 24 avenue Louis Mazet, 46 500 Gramat. Tél.: 05 65 34 47 16 / [email protected]