Chine : 100 millions d’ouvriers bientôt remplacés par des robots

Article publié dans le numéro de septembre (n°103), par Bluboux, mis en ligne le 29 septembre 2016

La Chine produit 25 % de tous les objets manufacturés de la planète. Mais, au grand dam des actionnaires, des banquiers et des fonds de pensions, les salaires chinois augmentent bien trop vite ! Qu’à cela ne tienne, remplaçons les humains par des robots ! C’est le plan que vient d’arrêter le gouvernement chinois à horizon 2049. Pas mal pour fêter le centenaire de la révolution chinoise, non ?

Cent millions de personnes sont employées dans l'industrie manufacturière en Chine et cette activité représente 36 % du PIB (à titre de comparaison l’industrie manufacturière américaine emploie 12 millions de travailleurs). Des millions de travailleurs « esclaves », peu qualifiés, ont trouvé un emploi dans les usines gigantesques, produisant une gamme inimaginable de produits de consommation. Songez que la Chine représentait seulement 3 % de la fabrication mondiale en 1990 contre près de 25 % aujourd'hui.

Mais depuis deux ans le moteur de fabrication de la Chine commence à tousser et montrer des signes de faiblesses. La cause ? Les salaires, qui ont augmenté à l’allure vertigineuse pour la Chine de 12 % par an en moyenne depuis 2001. Devant cette situation qui laisse la porte ouverte aux concurrents venus de pays où la main d’œuvre ne sait pas encore exprimer ses revendications salariales et où les coûts sont compressés, comme le Viêt-Nam, la Thaïlande ou l’Indonésie, les dirigeants chinois ont décidé de lancer un gigantesque plan de robotisation dans l’industrie manufacturière. Des milliards vont être injectés pour massivement moderniser et automatiser les structures de production chinoises. Dans deux ans, les usines chinoises devront commencer à montrer leur nouveau visage et être parmi les plus innovantes du monde, laissant loin derrière les usines les plus sophistiquées d’Allemagne, du Japon ou des États-Unis.

L’automatisation n’est pas un domaine que les chinois découvrent. Le géant Foxconn, qui fabrique l'essentiel de nos téléphones portables et compte près d'un million et demi de salariés (plus grosse entreprise au monde en terme d'effectif), a déjà mis en place un plan de robotisation et remplacé 60 000 employés par des machines. L'objectif annoncé est d'atteindre un parc de 500 000 robots d'ici 2025.

L'an dernier, le gouvernement du Guangdong, une province qui possède de nombreuses grandes unités de production, a promis de dépenser 150 milliards de dollars pour équiper ses usines avec des robots industriels et créer deux nouveaux centres dédiés à l'automatisation avancée.

L'objectif annoncé par les dirigeants chinois est de dépasser l'Allemagne, le Japon et les États-Unis en termes de fabrication de produits sophistiqués haut de gamme en 2049, pour le 100ème anniversaire de la fondation de la République Populaire de Chine. Pour y arriver, le gouvernement a besoin que les fabricants chinois adoptent des robots par millions. Il souhaite également que les entreprises chinoises commencent à produire de plus en plus de ces robots. L'espoir sous-jacent à cette politique est de créer un cercle vertueux, en aidant à la naissance d'une nouvelle industrie de haute technologie avec des innovations qui pourraient inspirer d'autres secteurs d’activité, et faire ainsi tâche d’encre.

Mais ce brusque changement de cap vers l'automatisation à outrance, provoquera évidemment des difficultés économiques et des troubles sociaux. Sociaux parce que si des dizaines de millions de chinois perdent leur boulot dans les prochaines années, ça va devenir « chaud patate » dans l'empire du milieu. Et cette évolution ne concernera bien évidemment pas que la Chine…

Une petite question me taraude : dans cette merveilleuse projection du capitalisme, bientôt, à part quelques milliardaires, qui restera-t-il pour acheter leurs saloperies ?