Source : Page de suie (blog), mis en ligne le 30 septembre 2014.
Vous l'avez sans doute noté, les robocops utilisent de plus en plus les flash-ball. Qui plus est à "tir tendu", occasionnant de vilaines blessures. Que ce soit sur la ZAD du Testet ou ailleurs. Nous publions ci-dessous un article qui date de février 2013, publié sur le blog Page de suie, qui permet de faire le point sur ces armes qui peuvent être létales.
Un jeune intérimaire belge d’ArcelorMittal de 25 ans, John David, blessé lors de la manifestation des métallos mercredi à Strasbourg, a perdu l’usage de son œil après avoir été touché par un tir de Flash-ball.
Suite à cette violence policière – une de plus – , j’ai potassé la réglementation sur l’usage du Flash-ball et l’ai comparé avec les photos d’hier…
Aïe ! Problème, big problème même !
Premier chose qui saute aux yeux… l’arme que les gendarmes ont utilisé à Strasbourg, n’est pas un Flash-ball !
Voici un Flash-ball :
Et voici ce qui a été utilisé hier…
Le premier est le vrai Flash-Ball Super-Pro à balles molles de 44mm (29gr.) commercialisé par Verney-Carron, en service depuis 1995, le second est le LDB40 "Exact Impact" à projectiles "mi-durs" de 40×46mm (95 gr. avec partie en plastique) commercialisé par Brugger & Thomet, en service depuis 2006, et conçu pour riposter à des armes réelles…
Voici un tableau comparatif de ces deux armes, où l’on voit bien la différence entre le "vieux" Flash-ball sans viseur, au tir approximatif limité à 7-10 m et cette saloperie de LDB40 qui possède un viseur Eotech-552 – destiné à l’usage militaire – , qui a une portée précise entre 10 et 30 m ! Selon le CNDS, en dessous de trente mètres, le point visé est systématiquement atteint !
Cette arme fut adoptée par les "forces de l’ordre" suite aux émeutes de 2005, pour pouvoir riposter aux agressions par armes. Elle fut discrètement incorporée dans l’ensemble des unités de police et de gendarmerie depuis.
- En 2009, la Direction centrale de la Sécurité publique avait rappelé la proscription de viser "au niveau du visage ou de la tête" et la nécessité d’une utilisation "proportionnée" (SIPA).
- Toujours en 2009, le CNDS à émit de graves réserves quand à son usage lors d’un attroupement et l’a déclaré "peu adaptée lors de manifestations"
-Si le classique Flash-ball n’est pas très efficace utilisé en tir tendu (chute de la trajectoire après quelques mètres) et jamais à moins de 7 m , le LDB40 quant à lui, DOIT être utilisé en tir tendu puisque sa balistique est comparable à une munition réelle (canon rayé), mais il ne peut JAMAIS être utilisé à moins de 10 m. Et point important, les deux ne peuvent en aucun cas être utilisés hors du cadre légal de la légitime défense !!!
Face à la multiplication de plusieurs blessures sérieuses occasionnées par des tirs de Flash-ball la Direction centrale de la sécurité publique (DSCP) a adressé, en mai 2009, une note aux divers directeurs départementaux leur rappelant les "règles impératives" de l’utilisation de cette arme, notamment le respect des distances minimales "pas moins de sept mètres pour le Flash-ball" et "pas moins de dix mètres pour le LDB40" (15 selon le CNDS), proscrivant la visée "au niveau du visage ou de la tête" et insistant sur le fait que l’utilisation devait être "proportionnée" aux faits et liée à la légitime défense.
Interrogé en 2006 par l’AFP un expert en armes avait déclaré sous couvert de l’anonymat que le Flash-ball est une arme "théoriquement non létale" mais que le tireur ne doit en aucun l’utiliser à moins que la distance prévue (7 & 10 m) et surtout ne pas viser la tête car "une balle de flash-ball à bout portant peut tuer". Dans son entretien avec l’AFP en 2002, l’inventeur du Flash-ball, Pierre Richet, rappelait déjà les règles d’utilisation: "ne tirer qu’en légitime défense, que lorsque l’on risque de prendre un coup ou qu’on en a déjà pris un, ne pas braquer les gens", concluant "si on les transgresse, cela veut dire que l’on est incapable d’utiliser l’arme". CQFD !!!
On peut donc conclure en disant que ce LDB40 est prévu pour tirer de loin et avec précision sur une cible sélectionnée et ajustée… ce qui implique donc un "tir plus réfléchi, précédé d’un temps d’observation et d’ajustement dans le viseur de la cible" ! Effectivement, c’est bien ce qui c’est passé à Strasbourg, regardez les photos, vous verrez des gendarmes en position de visée sur appui, viser calmement et consciencieusement leurs cibles – heureusement qu’ils tirent comme des clenches, il y aurait plus de blessés – , mais les photos montrent aussi des gendarmes qui ciblent des travailleurs à moins des dix mètres réglementaires, et surtout dans des situations CALMES, sans aucun danger pour eux !!! Un tribunal français a déjà condamné (30 avril 2012) un gendarme pour ce genre de faute grave ayant conduit à… la perte d’un œil !
Voici les photos qui montrent clairement les gendarmes viser sciemment les travailleurs:
Tout les témoignages parlent de tirs à hauteur de visages et quasi à bout-portant! De toutes façons avec leurs viseurs EOTECH, on voit nettement les yeux de celui qu’on vise… et on se marre "Tiens prends ça dans la gueule connard" ! J’imagine bien les discussions au retour à la caserne: "dis donc, tu l’as pas raté le mec, hein. Y reviendra pas de sitôt celui-là…" Et ils doivent en être fier en plus !
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ArcelorMittal: un manifestant belge perd l’usage d’un oeil – article de l’Humanité
27 novembre 2007 blog – La liste des blessés s’allonge et la justice traîne
Le flash-ball, une arme à l’origine de graves blessures
AVIS ET RECOMMANDATIONS de la Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité – Saisine n°2008-1 du 12 mars 2008 (.pdf)
"Conseils d’urgence à l’intention des personnes gravement blessées par la police"
Info du syndicat hier:
Camarades, mauvaise nouvelle concernant John David: il a perdu son œil droit, il a une fracture de la pommette, et 8 points de suture a l’arcade. Il en a pour 5 jours là bas.
Dernières nouvelles: "on rentre à l instant de Strasbourg, John est en état de choc , il a quelques soucis de perte de mémoire suite a son état. Pour l’instant il porte une prothèse oculaire pour quelques semaines. Il va déposer plainte contre les flics francais et espère arriver a faire bouger les choses. Il nous demande un soutien fort et se réjouit de revoir sa famille et ses camas. Il doit rentrer lundi 11/02. Il vous embrasse tous et vous remercie pour votre soutien."
Le Lot en Action, 24 avenue Louis Mazet, 46 500 Gramat. Tél.: 05 65 34 47 16 / [email protected]