A Lavaur, « on s'est servi des enfants » pour accueillir Sarkozy

Rue89. 13 février 2012 par Zineb Dryef

« Sarkozy, Sarkozy ! » Ils n'ont pas plus de 12 ans mais ils ont acclamé le président de la République comme les plus fervents des militants de l'UMP, mardi 7 février sur le parvis de la nouvelle mairie de Lavaur (Tarn), petite ville de 12 000 habitants que Nicolas Sarkozy a choisie pour présenter les grandes lignes de sa politique familiale.

Dans ces images tournées par « Le Petit Journal » de Canal+, on voit l'accueil réservé au Président par le petit groupe d'enfants.

 

Les enfants crient « Sarkozy, Sarkozy ! »

« On leur a dit que c'était une grande chance »

Une maman d'élève, émue par ce qu'elle qualifie de « propagande », assure à Rue89 que des consignes très précises ont été fournies aux enfants :

« La veille, on leur a dit qu'on avait la grande chance de recevoir le Président dans notre petite ville, que c'était une aubaine. On leur a dit : “Le Président va peut-être nous donner des sous.” Chacun avait un petit drapeau. Ma fille, elle a 10 ans, m'en a parlé ; elle a refusé d'y aller.

Mais d'autres parents n'ont pas été prévenus. Le papier, une “invitation à aller regarder le défilé” remis la veille aux enfants, n'a pas été mis dans tous les cartables. Toutes les autorisations n'ont donc pas été signées. C'est scandaleux de se servir ainsi d'enfants. »

Dans un courrier envoyé aux parents, il était noté « que les enfants de l'Alae [Accueil loisirs associé aux écoles, ndlr] du centre assisteront au passage du cortège présidentiel sur les allées Jean-Jaurès. Dans l'hypothèse où vous ne souhaiteriez pas que votre enfant participe à cette animation, veuillez le signaler à la direction de cette structure ».

« Je n'ai pas été prévenue ! »

Tous les parents n'ont pas signé l'autorisation, d'autres ne l'ont jamais reçue. Dans La Dépêche du Midi, certains protestent :

« On leur a donné un drapeau bleu blanc rouge et on leur a demandé de dire fort “Vive Sarkozy ! ”. Je n'ai pas été prévenue de cette sortie impromptue. »

« Pourquoi n'ont-ils pas uniquement pris les enfants ayant une autorisation ? Des recommandations très précises ont été données aux enfants : “Bien se tenir, se mettre en rang, crier ‘Sarkozy, Sarkozy’, leur donner des petits drapeaux français pour qu'ils puissent les secouer”. »

La responsable de cette mise en scène est la directrice de l'Alae. Après avoir donné les consignes la veille aux enfants, la sortie sur le parvis de la mairie le mardi 7 février, à l'heure du déjeuner, s'est déroulée sous sa responsabilité. La Dépêche du Midi décrit ainsi sa rencontre avec le chef de l'Etat :

« Il est happé par une animatrice de l'Alae qui l'embrasse. »

Que les enfants profitent de cette journée exceptionnelle

L'Alae et l'école du centre de Lavaur étant injoignables en cette période de vacances, Rue89 a contacté Bernard Carayon, député-maire UMP de la ville. Il nous a renvoyé à la déclaration de son adjoint à au maire chargé des Sports et de la Jeunesse, Joseph Dalla Riva, au quotidien La Dépêche. Il écrit :

« J'ai souhaité, à la fois en ma qualité d'ancien enseignant du public, et compte tenu de mes convictions républicaines profondes, que les enfants inscrits à l'Alae se situant sur le parcours, puissent profiter pleinement de cette journée exceptionnelle.

Le seul objectif était que ces enfants puissent voir le Président, le plus près possible afin qu'ils gardent de cet évènement un souvenir fort qu'ils pourront raconter encore en étant adultes.

Compte tenu des contraintes de sécurité particulières, nous avons eu cette possibilité au dernier moment, ce qui explique certaines imperfections.

Si je comprends les interrogations exprimées, je ne peux en revanche accepter la volonté délibérée de nuire, dont certains font preuve. Les sourires et les visages radieux lèvent toute ambiguïté et peuvent rassurer les parents. Les enfants n'ont pas agi sous la contrainte. »

Peu convaincus par cette explication, beaucoup de parents d'élèves attendent des explications de la mairie et la direction de l'école. Une maman :

« Ils doivent reconnaître que ce n'était pas légitime d'utiliser des mineurs pour faire de la politique. »

Une semaine après, cette visite laisse un goût amer aux habitants. A la polémique suscitée par la présence des élèves de l'école primaire s'ajoute la confiscation d'une banderole par des gendarmes. Mobilisés contre la suppression d'une classe, des enseignants ont déroulé une banderole « Ecole sacrifiée, avenir en danger ». Las, deux gendarmes sont partis avec.

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